List of abstracts (in French and English) in alphabetical order of authors' names.
Click on the title to read the abstract
***
ROUND TABLE #1 – Informing on psychological violence
Discussant : Jeanne Wetzels
Guests :
Sophie Boutboul (journalist)
Ynaée Benaben (co-founder of the association En Avant Toutes)
Anne Billows (illustrator, comic book creator and author of Amours en cendres)
Occurring in the private, public or even digital sphere, psychological violence belongs to the continuum of sexist and sexual violence. Recently, various cases have helped to bring them to light, thus contributing to their denaturalisation and, in fact, to (re)questioning the boundaries of sexism and gender-based violence. However, these forms of violence still struggle to be recognised as such, often being minimised and confined to the field of the acceptable.
Through an approach that is at once militant, journalistic and artistic, this round table invites us to question the contours, manifestations and causes of psychological violence. In a context where psychological violence is trivialized and not very audible, this discussion also proposes to consider the stakes of their mediatization and the possible and effective means to make the public aware of their existence and to fight them.
Table-ronde 1 – Informer sur les violences psychologiques
Discutante : Jeanne Wetzels
Invitées :
Sophie Boutboul (journaliste)
Ynaée Benaben (co-fondatrice de l’association En Avant Toutes)
Anne Billows (illustratrice, créatrice de BD et autrice d'Amours en cendres)
Survenant dans la sphère privée, publique ou même numérique, les violences psychologiques appartiennent au continuum des violences sexistes et sexuelles. Récemment, différentes affaires ont contribué à les mettre en lumière, participant ainsi à les dénaturaliser et, de fait, à (ré)interroger les frontières du sexisme et des violences fondées sur le genre. Pour autant, ces violences peinent toujours à être reconnues comme telles, faisant bien souvent l’objet d’une minimisation qui les cantonnent au domaine de l’acceptable.
À travers une approche à la fois militante, journalistique et artistique, cette table-ronde invite à interroger les contours, manifestations et ressorts des violences psychologiques. Dans un contexte où ces dernières sont banalisées et peu audibles, cette discussion propose également d’envisager les enjeux de leur médiatisation et les moyens possibles et efficaces pour sensibiliser les publics à leur existence et les combattre.
ROUND TABLE #2 – Media coverage of sexual violences occuring in medical environment
Discussant : Maëlle Bazin
Guests :
Olympe De GÊ, author and director of films and podcasts, co-director of the podcast Le Serment d'Augusta
Seçin TOPÇU, sociologist, research fellow at the CNRS
Sonia BISCH, spokesperson for the Stop to Obstetrical and Gynecological Violence collective
Xavier DELEU, author and director, co-director of the documentary #MeToo chez les médecins
This round-table, which will bring together four guests from the fields of activism, journalism and research, aims to question the discourse and media representations of sexual and gender-based violence perpetrated by healthcare professionals against patients. Since the 2010s, violence in the medical context has received particular attention, with the circulation in France of the expression "gynaecological and obstetrical violence", which originated from militant mobilisations in Latin America. From the major cases of serial sexual violence such as Joël Le Scouarnec or Emile Darai to the hashtag #Payetonutérus, we will discuss the way in which the media make this violence visible or not and set it up as a public problem. Several themes will be addressed: the inclusion of contemporary mobilisations in a longer historical perspective and the links with feminist mobilisations, the circulation of accounts of victims of violence, the role of media devices in the discourse of denunciation and awareness-raising.
Table-ronde - Médiatiser les violences sexistes et sexuelles dans le cadre médical
Cette table-ronde, qui réunira quatre invité-es à la croisée du militantisme, du journalisme, et de la recherche, vise à interroger les discours et les représentations médiatiques des violences sexistes et sexuelles exercées par des soignant·es envers des soigné·es. Depuis les années 2010, les violences dans le cadre médical ont fait l’objet d’une attention particulière, avec notamment la circulation en France de l’expression « violences gynécologiques et obstétricales », issue des mobilisations militantes d’Amérique latine. Des grandes affaires de violences sexuelles en série comme les affaires Joël Le Scouarnec ou Emile Daraï, au hashtag #Payetonutérus, nous discuterons de la façon dont les médias mettent ou non en visibilité ces violences et les érigent en problème public. Plusieurs thèmes seront abordés : l’inscription des mobilisations contemporaines dans une perspective historique et les liens avec les mobilisations féministes, la circulation des récits de victimes de violences, le rôle des dispositifs médiatiques dans les discours de dénonciation et de sensibilisation.
ALMAR MARIE_JEANNE Nathalie – Media and public health, what commitment? The choice of a private television which involves against domestic violence
There is a lot of studies on media coverage of gender-based violence (Buisson, Wetzels, 2022), with a particular focus on femicide or domestic violence (Guérard and Lavender, 1999; Sapio, 2022; Sépulchre, 2019; Lochon, 2021). Following on from this research, we propose to question the role of the media in the implementation of a public policy against domestic violence in Réunion island. Our proposal is part of the ANR VIdOM project, Gender Violence and Intersectionality in French Overseas Territories (2021-2024).
We will focus here on the initiative of a local private television channel, which decides to position itself and to go beyond its role as information mediator to engage in the production of a campaign for the elimination of violence against women.
To what extent is the media involved in co-building violence against women into a social or even public health problem?
Our analysis will therefore focus both on production conditions (Damian-Gaillard, et al., 2021), and on staging the testimonies of victims and perpetrators of violence in different media formats.
Média et santé publique : quel engagement ? Le positionnement d’une chaîne de télévision privée en faveur de la lutte contre les violences conjugales
Les travaux s’intéressant au traitement médiatique des violences sexistes et sexuelles (Wetzel, Buisson, 2022) sont nombreux et s’intéressent particulièrement aux féminicides ou aux violences conjugales (Guérard et Lavender, 1999 ; Sapio, 2022 ; Sépulchre, 2019 ; Lochon, 2021). Dans la continuité de ces recherches, nous proposons de questionner le rôle des médias dans la mise en œuvre d’une politique publique de lutte contre les violences faites aux femmes à la Réunion. Notre proposition s’inscrit dans le cadre du projet ANR VIdOM, Violences de genre et intersectionnalité dans les outre-mer français (2021-2024).
Nous nous intéresserons ici à l’initiative d’une chaîne de télévision privée locale, qui décide de se positionner et d’aller au-delà de son rôle de médiation de l’information pour s’engager dans la production d’une campagne pour l’élimination des violences faites aux femmes.
Dans quelle mesure, les médias participent-ils à la co-construction des violences faites aux femmes en un problème de société, voire de santé publique ?
Notre analyse s’intéressera ainsi à la fois aux conditions de production ( Damian-Gaillard, et al., 2021), et à la mise en scène des témoignages des victimes et des auteurs de violence au sein des différents formats médiatiques.
Bibliography
ALMAR Nathalie., SELLIER Geneviève., « Production, médiation, réception : les fictions audiovisuelles au prisme du genre. Un état de la recherche en France », in Sexe et genre des mondes culturels. Publics, artistes, intermédiaires, ENS Editions, 2020
ALMAR Nathalie., « Revendications féminines au sein de la sphère discursive contemporaine
dans les Antilles françaises », in Andrianjafitrimo-Magdeleine V., Arino M. (dir.), Iles/Elles,
Résistances et revendications féminines dans les îles des Caraïbes et de l’océan Indien, XVIIXXIème siècles, Université de La Réunion, 2015, pp. 47-56
ALMAR N., CANTACUZENE R., LEFAUCHEUR N., « Pratiques culturelles, production des identités et questionnement des frontières de genre », in Octobre S. (dir.), Questions de genre, questions de culture, Ministère de la Culture et de la Communication, Paris, 2014, pp. 75-100
BUISSON Charlotte, WETZELS Jeanne, Les violences sexistes et sexuelles, Que sais-je, PUF, Paris, 2022
BRUNEEL Emmanuelle (dir.), Genre et médias. Quelles représentations?, Paris,
L’Harmattan, coll. « Communication et civilisation », 2022
DAMIAN-GAILLARD Béatrice, MONTAÑOLA Sandy, SAITTA Eugénie, Genre et journalisme. Des salles de rédaction aux discours médiatiques, Louvain-la-Neuve, De Boeck Supérieur, 2021.
DELAGE Pauline, Violences conjugales. Du combat féministe à la cause publique, Presses de Sciences Po, coll. « Académique », 2017.
DORLIN Elsa (dir.), Sexe, race, classe. Pour une épistémologie de la domination, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Actuel Marx », 2009
GUÉRARD Ghislaine, LAVENDER Anne, « Le féminicide conjugal, un phénomène ignoré. Une analyse de la couverture journalistique de trois quotidiens montréalais », Recherches féministes, vol. 2, n°12, 1999, pp. 159-177.
KELLY Liz, Surviving sexual violence, Minneapolis, University of Minnesota Press, coll. « Feminist Perspectives Series », 1988.
FAGET Jacques, « Médiation et violences conjugales », Champ Pénal, nouvelle revue internationale de criminologie, vol I, 2004
LOCHON Annie, « Trente ans de médiatisation des violences sexistes et sexuelles : L’exemple de deux journaux français », Emulations- Revue de sciences sociales, 2021.
NOVELLO PAGLIANTI Nanta et TRUDA Giovanna, « Changer les attitudes contre la violence de genre : culture, éducation et apprentissage mutuels », ICSR Méditerranean Knowledge, Working Paper Series,vol 1, 2017
RUFFIO Claire, « De “MeToo’ à “WhyIdidntReport’ : un an de couverture médiatique de violences en tous genre. Du cadrage fait-diversier à la co-construction un phénomène de société ? », Congrès GIS genre et émancipation, Angers, 2019.
SAPIO Giuseppina, « Féminicides en France : la chair des archives médiatiques », dans Lydie Bodiou et Frédéric Chauvaud (dir.), Les archives du féminicide, Paris, Hermann, 2022, pp. 109-128.
SAPIO Giuseppina, « Victimes de violences conjugales face aux campagnes institutionnelles, entre ventriloquie, injonctions et paradoxes », Études de communication, 54, 2020, p.53-70.
SEPULCHRE Sarah, « La médiatisation paradoxale des violences à l’égard des femmes dans la presse quotidienne belge francophone », French Journal for Media Research, vol. 11, 2019.
VOIROL Olivier., « Les luttes pour la visibilité », Réseaux, 1-2, n°129-130, 2005, pp. 89-121
BEAULIEU Laure - Journalistic investigations on gender-based and sexual violence and developments in professional practices at the turn of the 2010s
This paper will examine journalistic practices and their specificities in the case of investigations involving revelations of sexist and sexual violence (Buisson, Wetzels, 2022) in the post #Metoo context (Cavalin et al., 2022). How do these investigations imply a redefinition of journalistic practices ? Several issues emerge in the conduct of investigations into sexist and sexual violence and these issues imply changes in the ordinary practices of journalism. Firstly, the relationship between sources and the journalist is changed. Secondly, these investigations disrupt the established relationship between the judicial agenda and the journalistic field. Thirdly, these investigations imply new forms of organisation of journalistic work and very important human resources. Journalists have to evolve their methods of gathering evidence and justifying the facts they put forward (Turchi, 2021). They must also rethink the issue of the (non-)anonymisation of perpetrators and victims of violence in the process of writing these investigations.
Enquêtes journalistiques sur les violences sexistes et sexuelles et évolutions des pratiques professionnelles au tournant des années 2010
Dans cette communication, il s’agira de s’interroger sur les pratiques journalistiques et leurs spécificités dans le cas d’enquêtes impliquant des révélations de violences sexistes et sexuelles (Buisson, Wetzels, 2022) dans le contexte post #Metoo (Cavalin et al., 2022). En quoi ces enquêtes impliquent une redéfinition des pratiques journalistiques ? Plusieurs enjeux apparaissent dans la réalisation d’enquêtes sur les violences sexistes et sexuelles et ces enjeux impliquent des modifications des pratiques ordinaires du journalisme. Premièrement, les liens entre les sources et le ou la journaliste sont bouleversés. Deuxièmement, ces enquêtes bousculent les rapports établis entre l’agenda judiciaire et le champ journalistique. Troisièmement, ces enquêtes impliquent des formes d’organisation du travail journalistique inédites et des forces humaines très importantes. Les journalistes doivent faire évoluer leurs méthodes pour recueillir des preuves et justifier les faits qu’ils/elles avancent (Turchi, 2021). Ils et elles doivent aussi repenser la question de la (non) anonymisation des auteurs et des victimes de violences dans le processus d’écriture de ces enquêtes.
BECCARELLI Marine – The representation of rape in the French radio media (late 1960s - end of the 1990s)
This contribution, which is part of axis #2 of the conference, proposes to study the media representation of rape on French radio from a historical perspective, from the late 1960s to the end of the 1990s, through the sound archives kept at the INA (Institut National de l’Audiovisuel, institution in charge of collecting, preserving and promoting French audiovisual archives). Using descriptors from the INA's databases, the aim is to observe the types of programmes in which the issue of rape has been addressed over time (news programmes, magazines, reports and documentaries, programmes aimed at a female audience, open lines, etc.) from a quantitative point of view, but also to analyse the media treatment and the representations conveyed of this sexual violence, through a qualitative approach, which will take into account the feminist movement of the second wave, the evolutions of the definition of rape and the legislative changes during the period - modification of the definition of rape in 1980, entry into the law of marital rape in 1992.
The type of people who used to talk about this subject on the air will be analysed (journalists, victims, perpetrators or witnesses of rape, jurists, experts, politicians, activists, etc.), as well as the type of discourse produced around this sexual violence, particularly the rhetorical devices used. As radio is a medium without images, the aim is to see whether this absence of visual elements influenced the representations of rape conveyed on the air. For example, was it easier for victims to speak out because of the anonymity of radio?
The study will begin at the time of sexual liberation, which began in the late 1960s, and will end in the early 2000s, at a time when the mention of rape is increasingly present on the radio according to the archives kept, particularly in the news.
Although this analysis based on the INA descriptors will only reflect a portion of the programmes that actually dealt with rape during the period, since the archive records are not necessarily complete and not all the programmes have been preserved, it will nevertheless constitute an initial approach to this question, over over some thirty years, and will pave the way for a more detailed analysis of these representations, or even extend them to include radio representations of other forms of gender-based and sexual violence.
La représentation du viol dans les médias radiophoniques français (fin des années 1960-fin des années 1990)
Cette contribution, qui s’inscrit dans l’axe 2 du colloque, propose d’étudier la représentation médiatique du viol à la radio française dans une perspective historique, de la fin des années 1960 jusqu’à la fin des années 1990, à travers les archives sonores conservées à l’INA.
Il s’agira d’observer, à partir des descripteurs des bases de données de l’INA, dans quels types d’émissions la question du viol a été abordée au fil du temps (journaux d’information, magazines, reportages et documentaires, émissions destinées à une audience féminines, libre-antennes…) d’un point de vue quantitatif, mais aussi d’analyser le traitement médiatique et les représentations véhiculées de ces violences sexuelles, à travers une approche qualitative, qui prendra en compte le mouvement féministe de la seconde vague, les évolutions de la définition du viol et les changements législatifs au cours de la période – modification de la définition du viol en 1980, entrée dans la loi du viol conjugal en 1992.
Le type de personnes mobilisées pour évoquer ce sujet à l’antenne sera analysé (journalistes, victimes, auteur·e.s ou témoins de viols, juristes, expert·es, politiques, militant·es…), ainsi que le type de discours produit autour de ces violences sexuelles, notamment les procédés rhétoriques utilisés.
La radio étant un média dépourvu d’images, il s’agira de voir si cette absence d’éléments visuels influe sur les représentations du viol véhiculées sur les ondes. Par exemple, y a-t-il une prise de parole des victimes plus facile en raison de l’anonymat rendu possible à la radio ? L’étude commencera au moment de la libération sexuelle qui s’initie à la fin des années 1960, et s’arrêtera au début des années 2000, à un moment où l’évocation des viols est de plus en plus présente sur les ondes radiophoniques selon les archives conservées, en particulier dans les journaux d’informations.
Si cette analyse basée sur les descripteurs de l’INA ne reflétera qu’une portion des émissions ayant été effectivement traité de viol au cours de la période, puisque les notices des archives ne sont pas forcément renseignées et que toutes les émissions n’ont pas été conservées, elle constituera toutefois une première approche de cette question, sur une trentaine d’années, et permettra d’ouvrir la voie à une analyse plus fine de ces représentation, voire d’élargir aux représentations radiophoniques d’autres violences sexistes et sexuelles.
Bibliography
AMBROISE-RENDU Anne-Claude, « Et la presse inventa le crime passionnel », L'Histoire, n° 168, juillet-août 1993, p. 98-100
BAZIN Maëlle, SAPIO Giuseppina, « (Dé)stigmatisation : médias, exclusions, résistances », dans Maëlle Bazin, Frédéric Lambert et Giuseppina Sapio, Stigmatiser : discours médiatiques et normes sociales, Lormont, Le Bord de l’eau, 2020, pp. 23-35.
BECCARELLI Marine, « Mémoire des ondes. Les archives de la radio française », Sociétés & Représentations,numéro « Sons et cultures sonores » dirigé par Pascale Goetschel et Christophe Granger, 2020/1, n°49, pp. 181-190.
BRANCHE Raphaëlle, VIRGILI Fabrice (dir.), Viols en temps de guerre, Paris, Payot, 2011
BUISSON Charlotte, WETZELS Jeanne, Les violences sexistes et sexuelles, Paris, Presses Universitaires de France, coll. « Que Sais-Je », 2022.
CHARLESWORTH Sara, MCDONALD Paula, « Framing sexual harassment through media representations », Women's Studies International Forum, n°37, 2013, pp. 95-103.
DAMIAN-GAILLARD Béatrice, MONTAÑOLA Sandy, SAITTA Eugénie, Genre et journalisme. Des salles de rédaction aux discours médiatiques, Louvain-la-Neuve, De Boeck Supérieur, 2021.
DELAGE Pauline, Violences conjugales. Du combat féministe à la cause publique, Presses de Sciences Po, coll. « Académique », 2017.
EHRICK, Christine, “Thoughts on the history of radio and women’s voices”, in LINDGREN M. et LOVIGLIO J. (dir.), The Routledge Companion to Radio and Podcast Studies, London, Routledge, 2022, pp. 144-151.
GUÉRARD Ghislaine, LAVENDER Anne, « Le féminicide conjugal, un phénomène ignoré. Une analyse de la couverture journalistique de trois quotidiens montréalais », Recherches féministes, vol. 2, n°12, 1999, pp. 159-177.
HOUEL Annick, MERCADER Patricia, SOBOTA Helga, Crime passionnel, crime ordinaire ?, Paris, Presses Universitaires de France, 2003.
LOCHON Annie, « Trente ans de médiatisation des violences sexistes et sexuelles : L’exemple de deux journaux français », Emulations - Revue de sciences sociales, 2021.
MCKAY Anne, ‘Speaking Up: voice amplification and women’s struggle’, dans Caroline Mitchell (dir.), Women and Radio. Airing Differences, London- New York: Routledge, 2000, pp. 15-28.
SAPIO Giuseppina, « Féminicides en France : la chair des archives médiatiques », dans Lydie Bodiou et Frédéric Chauvaud (dir.), Les archives du féminicide, Paris, Hermann, 2022, pp. 109-128.
SAPIO Giuseppina, « L’amour qui hait. La formule “crime passionnel” dans la presse française contemporaine », Semen [en ligne], n°47, 2019.
BROU Coline & NOIR Maëlle - Media and feminicide census by the feminist collective #NousToutes in France: a virtuous circle ?
Currently, there is no institutional and up-to-date femicide census in France. Since January 2022, the feminist collective #NousToutes started to undertake periodic media-monitoring to identify and qualify these murders of women because they are women, both within and outside the domestic sphere. Approximately fifteen volunteers are taking turns every day to analyse dozens of press articles generated by a list of key-words that have been selected based on mainstream media’s description of femicides. As such, not only the media enable the very existence of this femicide census, they also allow for greater awareness in relation to the fight against femicides and gender-based violence more generally. Indeed, #NousToutes’ members are regularly interviewed about this advocacy work, as well as about the methodology adopted to characterise femicides and other strategies to eradicate this phenomenon. Hence, a relation of codependency has progressively developed between the media and #NousToutes as part of this fight for the right to be free from violence. However, this codependency presents some limitations as some specific femicide cases often escape the media’s scrutiny. As a result, the femicide census undertaken by #NousToutes’ volunteers de facto fails to provide a full picture of the phenomenon of femicides in France. As a response, and the tackle these limitations, together with five other community-based organisations, the collective has created an inter-organisation dedicated to the fight against femicides. Media sources and field sources are thus combined to allow for a more accurate femicide census.
Médias et décompte des féminicides en France par le collectif féministe #NousToutes: un cercle vertueux ?
En France, il n’existe pas de décompte institutionnel, quotidien et évolutif des féminicides. Le collectif #NousToutes se charge donc, depuis janvier 2022, d'opérer une veille médiatique pour identifier et caractériser ces meurtres de femmes parce qu’elles sont des femmes, dans le couple et en dehors. Une quinzaine de bénévoles se relaie pour analyser les dizaines d’articles de presse signalés par des alertes générées par des mots clés spécifiquement choisis en raison de leur utilisation par les médias pour décrire les féminicides. Ainsi, ce sont les médias qui, à la fois rendent le décompte des féminicides possible mais aussi le visibilisent lors de sujets dédiés aux violences de genre. En effet, les membres de #NousToutes sont régulièrement interrogées par les médias sur la méthode de décompte, les éléments de définition qui permettent la caractérisation des féminicides mais aussi, et plus largement sur le phénomène des violences féminicidaires et les revendications du collectif pour y mettre fin. Il existe donc une relation de co-dépendance entre les médias et #NousToutes dans la lutte contre les féminicides. Toutefois, cette co-dépendance présente des limites puisque certains meurtres misogynes échappent aux radars médiatiques. Le décompte effectué par les bénévoles est donc, de fait, sous-evalué et cet outil de plaidoyer ne rend compte que d'une partie seulement de l’ampleur des violences féminicidaires. Bousculant ce cercle vertueux et dans le but de pallier à cette limite, le collectif a créé l’Inter Orga féminicides avec cinq autres organisations féministes communautaires afin d’allier sources médiatiques et sources de terrain pour un décompte plus représentatif des féminicides.
CAR Viktorjia & RAVBAR Barbara – Media Framed Blame-Game: Croatian Online Media Reporting on Gender-Based Violence
The portrayal of gender-based violence in the media landscape is directly related to its normalization within society. The media have the power to shape notions of what is acceptable, create behavior trends, and to perpetuate, challenge or reject gender norms. Violence against women is the most common form of violation of women's rights (Walby, 2005). It is manifested in various forms and includes psychological, physical, sexual, and economic violence. According to available data from associations working with women victims of sexual violence, one in three women will experience some form of sexual violence during their lifetime (WHO, 2021). Because this form of violence is still associated with stigma, shame, and guilt that the victim feels thinking she made a mistake if she experienced sexual violence, a large number of cases are still covered up and not reported (Carlyle et al., 2014). In the public, sexual violence is still perceived as something private, hidden and even “dirty”, so it is not discussed.
The way in which the media report on this topic can greatly affect citizens' perceptions of violence against women as social problem (Hermes, 2012). Unethical or unprofessional reporting can be particularly detrimental to the survivor (Carter et al., 2013).
Following the framework of guidelines for reporting on violence against women published by UNESCO (Impe, 2019) and the International Federation of Journalists (2014), this study explores frames, narratives and language patterns used in Croatian online media articles to represent women while reporting about violence against them. The main objective of this research is to determine how violence against women is framed in selected Croatian online news articles and how it is exploited to attract the reader’s attention. First, we conducted qualitative content analysis and narrative analysis on selected articles published on five most popular Croatian news portals in the period from April 2018 (when the Istanbul Convention was ratified in Croatia) to October 2020. Following the same research framework, we analyzed another sample from January 15th to March 15th, 2021, after a former student of one drama school in Belgrade stepped out with her experience of being sexually abused by her male teacher. Her confession initiated an avalanche of similar confessions on social media in neighboring countries. Total sample included 1186 articles.
There are five research questions: (RQ1): How violence against women is framed in the article? (RQ2): How a woman in the article is addressed? (RQ3): Who and how in the article is blamed for the violence? (RQ4): Is secondary victimization present in the article and if so, using which language and narrative? (RQ5): How violence against women has been used as a topic to attract readers' attention?
Comparative results of analysis show how violence against women is framed as a private problem, while the blame for the violence is often, at least partly, shifted to the woman responsible for their own inappropriate behavior (e.g. how they dress) which gives excuses for the perpetrator. Also, results show how the secondary victimization is manifested in articles, and how violence against women as a topic is exploited to attract the readers’ attention since sensationalism is often present in headlines and article’s narrative.
Inversion de la culpabilité par les médias croates en ligne : informer sur les violences de genre
La représentation des violences de genres dans le paysage médiatique est directement liée à sa normalisation au sein de nos sociétés. Les médias ont le pouvoir de façonner les notions de ce qui est acceptable, de créer des tendances comportementales, et de perpétuer, contester ou rejeter les normes de genre. La violence contre les femmes est la forme la plus courante de violation des droits des femmes (Walby, 2005). Elle se manifeste sous diverses formes et comprend la violence psychologique, physique, sexuelle et économique. Selon les données disponibles auprès des associations travaillant avec les femmes victimes de violences sexuelles, une femme sur trois subira une forme de violence sexuelle au cours de sa vie (OMS, 2021). Parce que cette forme de violence est encore associée à la stigmatisation, à la honte et à la culpabilité que ressent la victime en pensant qu'elle a commis une erreur si elle a subi des violences sexuelles, un grand nombre de cas sont encore couverts et non signalés (Carlyle et al., 2014). Auprès de l’opinion publique, la violence sexuelle est encore perçue comme relevant du privé, de ce qui doit être caché et même de "sale", de sorte qu'elle n'est pas discutée.
La manière dont les médias traitent ce sujet peut grandement influencer la perception des citoyens de la violence envers les femmes en tant que problème social (Hermes, 2012). Les reportages non éthiques ou non professionnels peuvent être particulièrement préjudiciables à la survivante (Carter et al., 2013). En s’appuyant sur les recommandations publiées par l'UNESCO (Impe, 2019) et la Fédération internationale des journalistes (2014) pour mener un reportage portant sur les violences de genre, cette étude explore les cadres, les récits et les modèles de langage utilisés dans les articles des médias en ligne croates pour représenter les femmes tout en rapportant la violence à leur égard. L'objectif principal de cette recherche est de déterminer comment la violence à l'égard des femmes est encadrée dans une sélection d'articles de presse en ligne croates et comment est-elle exploitée pour attirer l'attention du lecteur. Tout d'abord, nous avons effectué une analyse de contenu qualitative et une analyse narrative sur des articles sélectionnés, publiés sur cinq portails d'actualités croates les plus populaires au cours de la période allant d'avril 2018 (lorsque la Convention d'Istanbul a été ratifiée en Croatie) à octobre 2020. En suivant le même cadre de recherche, nous avons analysé un autre échantillon du 15 janvier au 15 mars 2021, après qu'une ancienne élève d'une école de théâtre de Belgrade ait révélé son expérience d'abus sexuel par son professeur masculin. Sa confession a déclenché une avalanche de révélations similaires sur les médias sociaux dans les pays voisins. L'échantillon total comprend 1186 articles.
Il y a cinq questions de recherche : (RQ1) : Comment la violence à l'égard des femmes est-elle formulée dans l'article ? (RQ2) : Comment la femme est abordée dans l'article ? (RQ3) : Qui et comment, dans l'article, est blâmé pour la violence ? (RQ4) : La victimisation secondaire est-elle présente dans l'article et si oui, en utilisant quel langage et quelle narration ? (RQ5) : Comment la violence contre les femmes a-t-elle été utilisée comme sujet pour attirer l'attention des lecteurs ? Les résultats comparatifs de l'analyse montrent que la violence à l'égard des femmes est présentée comme un problème privé, tandis que la responsabilité de la violence est souvent, du moins en partie, rejetée sur la femme.
Bibliography
Carlyle, K.E., Orr, C., Savage, M.W. and Babin, E.A. (2014). News coverage of intimate partner violence: impact on prosocial responses. Media Psychology. Vol. 17 (4), pp. 451–471.
Carter, C., Steiner, L. and McLaughlin, L. (2013). The Routledge Companion to Media and Gender. London: Routledge.
Hermes, J. (2012). Žene i novinari/novinarke imaju prednost. Zagreb: Ured za ravnopravnost spolova Vlade RH.
IFJ (2014). IFJ Guidelines for Reporting on Violence Against Women. International Federation of Journalists. Available at: https://www.ifj.org/fileadmin/user_upload/IFJ_Guidelines_for_Reporting_on_Violence_Against_Women_EN.pdf [Accessed 21 January 2021].
Impe, AM. (2019). Reporting on Violence against Women and Girls: A Handbook for Journalists. Paris: UNESCO.
Jewkes, Y. and Linnemann, T. (2018). Media and Crime in the U.S. Thousand Oaks, CA: Sage.
Walby, S. (2005). Violence Against Women and the Millennium Development Goals. New York: United Nations, Division for the Advancement of Women.
WHO (2021). Devastatingly pervasive: 1 in 3 women globally experience violence. World Health Organization. Available at: https://www.who.int/news/item/09-03-2021-devastatingly-pervasive-1-in-3-women-globally-experience-violence [Accessed 21 April 2022].
CARRATALÀ Adolfo – Media discourse on "violence has no gender": disinformation against feminism
Mass media have been decisive actors in the public understanding of sexual and gender-based violence as a social problem. As a result, violence against women is no longer a content of crime news, but a topic that the media address with more rigor and deontological criteria. The progressive commitment of institutions in the fight against gender-based violence has crystallized in laws and public resources aimed at putting an end to this problem. However, in parallel to these legislative and social advances, some conservative actors have initiated actions to curb institutional recognition of the feminist agenda. The rise of far-right political parties has contributed to the strengthening of these campaigns and the denialism of gender-based violence is common in the Spanish pseudo-media close to the extreme right. These are websites that pretend to imitate conventional media but, in practice, act as platforms for the spread of highly polarized disinformation and fake news, often contrary to the rights of vulnerable social groups. The pseudo-media Mediterráneo Digital is one of the clearest examples of this phenomenon and often publishes hoaxes about policies against gender-based violence and news about assaults by women on men. This study analyzes the contents that this pseudo-media has published during 2022 in the section "Feminism" to understand what delegitimizing framing they make of the efforts to put an end to violence against women and to what extent this kind of disinformation reinforces the maxim "violence has no gender".
Le discours médiatique basé sur «la violence n'a pas de genre» : la désinformation contre le féminisme
Les médias ont été décisifs pour la compréhension de la violence sexuelle et sexiste en tant que problème social. Les violences faites aux femmes ne sont plus un contenu de l'actualité criminelle, mais un sujet que les médias abordent avec plus de rigueur et de critères déontologiques. L'engagement progressif des institutions dans la lutte contre les violences basées sur le genre s'est cristallisé dans des lois et des ressources publiques visant à mettre fin à ce problème. Cependant, parallèlement à ces avancées législatives et sociales, certains acteurs conservateurs ont initié des actions pour freiner la reconnaissance institutionnelle de l'agenda féministe. La montée en puissance des partis politiques d'extrême droite a contribué au renforcement de ces campagnes et le déni des violences sexistes est courant dans les pseudo-médias espagnols proches de l'extrême droite. Ce sont des sites Web qui prétendent imiter les médias conventionnels mais, dans la pratique, agissent comme des plateformes de diffusion de désinformation et de fausses informations hautement polarisées. Le pseudo-média Mediterráneo Digital est l'un des exemples les plus clairs de ce phénomène et publie souvent des canulars sur les politiques contre la violence sexiste et des informations sur les agressions des femmes contre les hommes. Cette étude analyse les contenus que ce pseudo-média a publiés durant l'année 2022 dans la rubrique "Féminisme" pour comprendre quel cadrage délégitimateur ils font des efforts pour mettre fin aux violences faites aux femmes et dans quelle mesure ce genre de désinformation renforce la maxime «la violence n'a pas de genre ».
COLISSON Pascale et LOUAZON Elena – Raising awareness on "sexual and gender-based violence" in French-speaking Belgium and France: from the editorial content to the newsrooms
This presentation focuses on the multiple awareness-raising initiatives implemented in France and French-speaking Belgium to improve media coverage of sexual and gender-based violence. Building on semi-structured interviews with reporters, it proposes to examine the impact of these initiatives both on the media coverage and on the interaction between reporters within the newsrooms. We compare the French media context - characterized by numerous isolated initiatives set up by media companies, often under the pressure from external groups (associations) or internal groups (unions, journalists' initiatives) - and the Belgian context where this work has mainly been carried out at the level of the professional group, through the Journalistic Ethics Council.
We first question the ways these initiative are appropriated: who appropriates them, how, at what cost. We then note that, if it does change the media coverage, those changes are occurring at the margins and are the result of -often free- work provided by journalists already sensitive to these issues. We then look at the ambivalent effects of these initiatives within the newsrooms. It appears that, if they do provoke reactions, it does not necessarily lead to internal upheavals nor does it challenge the prevalence of ordinary sexism and SGBV. It even seems to cause some forms of backlash and a polarization of newsrooms around these issues.
Sensibiliser aux VSS en Belgique francophone et en France : du contenu aux rédactions
Cette communication s’intéresse aux multiples dispositifs de sensibilisation à un meilleur traitement médiatique des VSS mis en place en France et en Belgique francophone, en proposant de voir les conséquences de ces dispositifs sur la production journalistique, ainsi que sur les interactions au sein des rédactions. En s’appuyant sur des entretiens semi-directifs avec des journalistes, il est proposé une comparaison entre un contexte médiatique français – marqué par de nombreuses actions mises en place isolément par les entreprises, souvent sous la pression de groupes externes (associations, collectifs) ou internes (syndicats, initiatives de journalistes salarié.e.s)- et un contexte belge où ce travail s’est surtout réalisé à l’échelle du groupe professionnel, notamment le Conseil de déontologie journalistique.
Il s’agit tout d’abord de s’intéresser aux modes d’appropriation de ces dispositifs par les journalistes : qui se les approprie, de quelle manière, à quel prix. On constate alors que si des évolutions ont bien lieu dans le traitement médiatique, elles se déploient à la marge et sont le fait du travail –souvent gratuit- fourni par des journalistes déjà sensibilisé.e.s. Dans un second temps, on s’intéresse aux effets ambivalents de ces dispositifs au sein des rédactions. Il apparaît que, s'ils provoquent des réactions et des prises de position, ils n’entraînent pas forcément de bouleversements internes et remettent peu en cause la prégnance du sexisme ordinaires et des VSS, pouvant même mener à des formes de backlash envers certain.e.s journalistes ainsi qu’à une polarisation des rédactions autour de ces enjeux.
DALIBERT Marion – « Whitewashing » the Culprits ? Sexual and Gender-Based Violence (SGBV) Through the Lens of the Media Coverage of Feminist Movements in the French Press (2002-2019)
Our paper aims to question the characterization of victims and culprits of sexual and gender-based violence (SGVB) in the media coverage of seven feminist movements (Ni putes ni soumises, Femen, la Barbe, Osez le féminisme, Mwasi, Lallab, #metoo) formed during the 2000s and 2010s in the French national general press, both in print and online. We examine the media coverage of these seven feminist collectives features two “typical” victims of SGVB: women of color and white upper-class women in France. The former are presented in the press as suffering violence from non-white men characterized - as a group - by intrinsic sexism. Whereas the latter are portrayed as suffering violence from “white men of power”, portrayed as socially disqualified individuals. In fact, they are supposed to embody repulsive exceptions to the group of white men from the upper classes who, for their part, take on the role of ally of the victims, or even sometimes (and temporarily) that of accomplice of the culprits, but never the perpetrator of SGVB. We argue that this media coverage, which feeds the "republican metanarrative" (Dalibert, 2020) on the French nation, reinforces the hegemony of the racial majority groups, since it paradoxically presents those who benefit from the social relations of power as being the most egalitarian.
« Blanchir » les coupables ? Les VSS au prisme de la médiatisation des mouvements féministes dans la presse française (2002-2019)
Notre communication vise à interroger la caractérisation des victimes et des coupables de VSS dans la médiatisation de sept mouvements féministes constitués dans les années 2000 et 2010 (Ni putes ni soumises, Femen, la Barbe, Osez le féminisme, Mwasi, Lallab, #metoo) au sein de la presse nationale généraliste papier et en ligne. Nous verrons que la médiatisation de ces sept collectifs féministes met en scène deux victimes « types » de VSS : les femmes ethnoracialisées et les femmes françaises blanches des classes supérieures. Les premières sont présentées dans la presse comme subissant les violences d’hommes non-blancs caractérisés - en tant que groupe- par un sexisme intrinsèque. Les secondes, elles, sont dépeintes comme subissant la violence d’« hommes blancs de pouvoir », mis en scène, quant à eux, comme des individus socialement disqualifiés, des exceptions repoussoir du groupe des hommes blancs des classes supérieures. Ce dernier revêt le rôle d’allié des victimes, voire parfois (et temporairement) celui de complice des coupables, mais jamais celui de coupable de VSS. Nous verrons que cette construction médiatique, qui alimente le « métarécit républicain » (Dalibert, 2020) sur la nation française, renforce l’hégémonie des groupes majoritaires, vu qu’elle présente paradoxalement ceux qui bénéficient des rapports sociaux comme étant les plus égalitaires.
DAMIAN-GAILLARD Béatrice & VÖRÖS Florian – Porn and gender-based and sexual violence: who speaks for the victims? A critical analysis of the politicization and media coverage of the "Pascal OP" case
In December 2021, the newspaper Le Monde published a four-part investigation on what became the "Pascal OP" affair, named after Pascal Ollitrault, the producer of the pornographic website French Bukkake. Ollitrault is under judicial investigation for the following charges: "collective rape", "aggravated human trafficking", "aggravated pimping", "money laundering", "concealed work" and "recording and distributing of images of a voluntary attack on the integrity of a person". About fifty women filed a complaint. At the same time, the Delegation for women’s rights in the French Senate prepares a report on pornography and violence. The senators Annick Billon, Alexandra Borchio Fontimp, Laurence Cohen and Laurence Rossignol organize eleven round tables, in which they hear, from January to May 2022, feminist associations, media regulation authorities, justice professionals, social workers, researchers and sex workers. The senators issue their report on September 27, 2022, under the title Porno: l'enfer du décor. The conclusions of this report are taken up by the press and debated on social media platforms by different actors including State officials, antiporn feminists and sex work activists.
Our paper focuses on the construction and circulation across political, media, academic and activist spaces of discourse on violence against women who perform in porn. We base our study on a socio-discursive analysis of several corpuses:
publications related to judicial investigations,
exchanges that took place during the round tables of the commission,
messages published on social media platforms,
the Enfer du décor Senate report,
video recordings of the hearings preparing this report.
We also base our argument on the direct observations we made of the hearings as well as on conversations and interviews with some of the protagonists of this controversy.
Our analysis will focus on the politics of circulation and citation of testimonies of sexual violence in pornography: who speaks for the victims, how and with what political aim? How are good victims, whose testimonies can be used to prove the essentially violent nature of porn as a whole, distinguished from bad victims, whose activism as sex workers is equated with pimping? And, finally, how stigma and crime are imposed as the only possible ways to fight violence against women in porn?
Porno et VSS : qui parle pour les victimes ? Analyse critique de la politisation et de la médiatisation de l'affaire "Pascal OP"
En décembre 2021, le quotidien Le Monde publie une enquête en quatre volets sur ce qui deviendra l’affaire « Pascal OP », du nom du producteur du site pornographique French Bukkake : Pascal Ollitrault. Celui-ci est poursuivi dans le cadre d’une information judiciaire ouverte pour les chefs d'inculpation suivants : « viols en réunion », « traite aggravée d'êtres humains », « proxénétisme aggravé », « blanchiment », « travail dissimulé » et « diffusion de l'enregistrement d'images relatives à la commission d'une atteinte volontaire à l'intégrité de la personne ». Une cinquantaine de femmes ont déposé plainte. Au même moment se tient une commission sénatoriale en lien avec la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, dont l’objectif est de proposer au gouvernement des orientations afin de réguler la pornographie en France. Les sénatrices Annick Billon, Alexandra Borchio Fontimp, Laurence Cohen et Laurence Rossignol organisent onze tables-rondes, dans lesquelles elles auditionnent, de janvier à mai 2022, des associations féministes, des membres de l’Arcom, des acteur·rice·s de la justice, du social, des chercheur·e·s, des professionnel·le·s de l’industrie pornographique, etc. Elles rendent leur rapport le 27 septembre 2022, sous le titre, Porno : l’enfer du décor. Les conclusions de ce rapport seront reprises dans la presse et débattues sur les réseaux socionumériques par des personnes intégrées aux espaces politique, médiatique et militant : associations féministes abolitionnistes œuvrant dans la lutte des violences sexistes et sexuelles envers les femmes, représentant·e·s des travailleur·se·s du sexe, etc.
Notre communication porte sur la construction et la circulation des discours sur les violences sexistes et sexuelles dans le secteur de la pornographie entre les espaces politique, médiatique, scientifique et militant. Nous appuierons notre étude sur l’analyse socio-discursive de plusieurs corpus composés :
des publications relatives aux enquêtes judiciaires (affaires OP et Jacquie Michel),
des échanges intervenus lors des tables-rondes de la commission,
des messages publiés sur les réseaux socio-numériques suite à la publication du rapport,
du rapport sénatorial,
des captations vidéos des auditions préparant ce rapport.
Notre réflexion intégrera également les observations que nous avons réalisées lors de notre audition et de nos échanges avec des actrices institutionnelles, membres d’instances œuvrant à la lutte des violences sexistes et sexuelles envers les femmes, ainsi qu’avec des travailleuses du sexe mobilisées pour la défense de leurs droits.
L’analyse se focalisera sur les modalités de circulation et de citation des témoignages d’actrices de pornographie victimes de violences sexuelles dans les espaces médiatiques et politiques : qui parle pour elles, à quel titre, sur quel registre émotionnel et avec quelle visée politique ? Comment s’opère le partage normatif entre les bonnes victimes, dont les témoignages sont mobilisés pour prouver le caractère essentiellement violent de « la » pornographie, et les mauvaises victimes, dont la mobilisation en tant que travailleuses du sexe est assimilée à du proxénétisme ? Et, enfin, comment la stigmatisation et la criminalisation de la pornographie sont-elles imposées comme les seules voies possibles pour lutter contre les VSS dans ce secteur d’activité ?
DE BARROS PINTO MIGUEL Raquel – Mediatization of feminist demonstrations on the « International day for the elimination of violence against women » : an analysis in French news TV broadcasts (2004-2022)
The " International day for the elimination of violence against women " was established by the UN on November 25, 1999. Violence against women, even before the creation of that date, is an agenda of the feminist movement around the world, being the subject of debates, publications and demonstrations organized by the movement (Sardenberg, Tavares, 2016). It is in the demonstrations where feminist agendas gain stage, leave the discussions of the private sphere and take to the streets (Tartakowsky, 2006; Mariot, 2006). And it is in the media, in turn, where such demonstrations gain greater visibility. In this context, the present research - in progress - aims to map and analyze the media coverage in France of the "25/11". To this end, a survey was carried out at the catalog of the Institut national de l'audiovisuel (INA) - as part of the project Gender Equality Monitoring (GEM, funded by the Agence Nationale de la recherche ANR) - in order to identify the news items broadcasted in French television newspapers on this theme since 1999 (year of the instauration of the date). A total of 89 news was found between 2004 and 2022. Each one of them is being watched, registered and analyzed, considering some questions such as: time of duration, who and how the news is reported, who is heard (feminist militants, women, aggressors, police, specialists), what is the focus of the report, images used, who organizes the demonstration, number of participants, the forms of protests and their evolution in history. To analyze the material, I dialogue with the precepts of discourse analysis, where discourse is considered a social practice, constructed in the movement in which the intra-discourse and the inter-discourse are interconnected (Pêcheux, 1997). Thus, its object is the materiality of the discourses produced, situated in their social, historical and cultural contexts (Paveau, 2006). For the analysis of the images/videos, the precepts of Roland Barthes (1964) will serve as a foundation, with emphasis on the importance of the description of the images, given their polysemic character. As a basis for the analysis, I will rely on references dealing with the history of the feminist movement in France, as well as about feminist demonstrations. Among relevant productions in these areas, the works of Pavard, Rochefort and Zancarini-Fournel (2020); Picq (2011); Jouët, Niemeyer and Pavard (2017); Bereni and Revillard (2012); Sarmento (2019) can be cited. Added to these are references that address the topic of violence against women and sexual and sexist violence, and it is possible to cite some of them such as Lochon (2021); Sapio (2022); Cavalin et al. (2022); Sardenberg et Tavares (2016), and the recently defended thesis of Irène Despontin-Lefèvre (2022). Finally, since I start from the idea of the media as a social, cultural, and power practice, I understand that a research that intends to investigate the mediatization of feminist demonstrations focuses not only on identifying and analyzing how such media coverage takes place, but also on contributing to the understanding of what a public discourse - such as the media - says about feminism and its demands.
Médiatisation des manifestations féministes lors de la "Journée Internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes": une analyse dans les journaux télévisés français (2004 - 2022)
La "Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes" a été instituée par l'ONU le 25 novembre 1999. La violence contre les femmes, même avant la création de cette date, est un agenda du mouvement féministe dans le monde entier, faisant l'objet de débats, de publications et de manifestations organisées par le mouvement (Sardenberg, Tavares, 2016). C'est dans les manifestations que les agendas féministes gagnent du terrain, quittent les discussions de la sphère privée et descendent dans la rue (Tartakowsky, 2006 ; Mariot, 2006). Et c'est dans les médias, à leur tour, que ces manifestations gagnent en visibilité. Dans ce contexte, la présente recherche - en cours - vise à cartographier et à analyser la couverture médiatique en France des manifestations féministes lors du "25/11". A cette fin, une recherche a été réalisée au catalogue de l'Institut national de l'audiovisuel (INA) - dans le cadre du projet Gender Equality Monitoring (GEM, financé par l'Agence Nationale de la recherche ANR) - afin d'identifier les articles diffusés dans les journaux télévisés français sur ce thème depuis 1999 (année de l'instauration de la date). Au total, 89 reportages ont été trouvés entre 2004 et 2022. Chacune d'entre elles est observée, enregistrée et analysée, en tenant compte de certaines questions telles que: la durée, qui et comment les nouvelles sont rapportées, qui est entendu, quel est le point central du reportage, les images utilisées, qui organise la manifestation, le nombre de participants, les formes des manifestations et leurs évolutions dans l'histoire. Pour l'analyse du matériel, je dialogue avec les préceptes de l'analyse du discours, où celui-ci est pris comme une pratique sociale, construite dans le mouvement dans lequel l'intra-discours et l'inter-discours sont interconnectés (Pêcheux, 1997). Ainsi, son objet est la matérialité des discours produits, situés dans leurs contextes sociaux, historiques et culturels (Paveau, 2006). Pour l'analyse des images/vidéos, les préceptes de Barthes (1964) serviront de base, en insistant sur l'importance de la description des images, étant donné son caractère polysémique. Comme base d'analyse, je m'appuierai sur des références traitant de l'histoire du mouvement féministe en France, ainsi que des manifestations féministes. Parmi les productions pertinentes dans ces domaines, on peut citer les travaux de Pavard, Rochefort et Zancarini-Fournel (2020); Picq (2011); Jouët, Niemeyer et Pavard (2017); Bereni et Revillard (2012); Sarmento (2019). S'y ajoutent des références qui abordent le thème des violences faites aux femmes et des violences sexuelles et sexistes, comme: Lochon (2021); Sapio (2022); Cavalin et al. (2022); Sardenberg et Tavares (2016), et la thèse récemment soutenue d'Irène Despontin-Lefèvre (2022). Enfin, puisque je pars de l'idée que les médias sont une pratique sociale, culturelle et de pouvoir, je comprends qu'une recherche qui entend enquêter sur la médiatisation des manifestations féministes se concentre non seulement sur l'identification et l'analyse de la manière dont cette couverture médiatique a lieu, mais aussi sur la contribution à la compréhension de ce qu'un discours public - comme les médias - dit du féminisme et de ses revendications.
Bibliography
BARTHES, Roland. Rhétorique de I’mage. Paris: Comunications, 1964.
BERENI Laure, REVILLARD Anne (dir.), « Un mouvement social paradigmatique, ce que le mouvement des femmes fait à la sociologie des mouvements sociaux », Sociétés contemporaines, n° 85, 2012, p. 1741.
CAVALIN Catherine et al., Les violences sexistes après #MeToo, Paris, Presses des Mines, 2022.
DESPONTIN-LEFÈVRE Irène, Stratégies de communication et pratiques militantes du mouvement féministe en France au début du 21ème siècle. Étude de cas du collectif #NousToutes. (sous la direction de Tristan Mattelard et Maxime Cervulle), Université Paris II Panthéon-Assas, thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication, 2022.
JOUËT Josiane, NIEMEYER Katharina, PAVARD Bibia, «Faire des vagues. Les mobilisations féministes en ligne », Réseaux, n° 201, 2017, p. 2157.
LOCHON Annie, « Trente ans de médiatisation des violences sexistes et sexuelles: L’exemple de deux journaux français », Emulations - Revue de sciences sociales, 2021.
MARIOT Nicolas, « Le frisson fait-il la manifestation? », Pouvoirs, v. 1, n° 116, 2006, p. 97-109.
PAVARD Bibia, ROCHEFORT Florence, ZANCARINI-FOURNEL Michelle, Ne nous libérez pas, on s'en charge. Une histoire des féminismes de 1789 à nos jours. Paris, La Découverte, 2020.
PAVEAU Marie-Anne, Les Prédiscours. Sens, mémoire, cognition. Paris, Presses Sorbonne nouvelle, 2006.
PÊCHEUX Michel, “Análise automática do discurso (AAD-69)”, dans: GADET Francoise, HAK Tony. Por uma análise automática do discurso: uma introdução à obra de M. Pêcheux. Campinas, Ed. Da Unicamp, 1997.
PICQ Françoise, Libération des femmes, quarante ans de mouvement. Brest : Editions Dialogues, 2011.
SAPIO Giuseppina, « Féminicides en France : la chair des archives médiatiques », dans Lydie Bodiou et Frédéric Chauvaud (dir.), Les archives du féminicide, Paris, Hermann, 2022, p.109-128.
SARMENTO Rayza. “A cobertura jornalística sobre o feminismo brasileiro (1921 a 2016): relação de público e provado na narrativa sobre o ativismo”, Norus – Novos rumos sociológicos, v.7, 2019, p. 349-374.
SARDENBERG Cecília M.B., TAVARES Márcia S. (orgs). Violência de gênero contra mulheres: suas diferentes faces e estratégias de enfrentamento e monitoramento. Salvador: EDUFBA, 2016.
TARTAKOWSKY Danielle. « Quand la rue fait l'histoire », Pouvoirs, v. 1, n° 116, 2006, p. 19-29.
DEKKER Mischa – Feminism in the Newsroom: How Street Harassment Became a Gender Issue in French and not in Dutch Media
While concepts of gender-based violence and male domination were largely absent from Dutch reporting on street harassment, feminist framings dominated press reports on this issue in France. This article seeks to explain why, in our interviews, most Dutch journalists stated that presenting it as a “feminist” issue would be overly “ideological” journalism, while their French counterparts explained how they adopted a feminist vocabulary in denouncing those who “minimized” this problem.
Scholarship on feminism and journalism is characterized by a conceptual divorce between, on the one hand, studies on the representation of feminism and gender issues in the media, and, on the other, a smaller body of works on journalists’ ideals with respect to feminism. This leaves a gap on how ideals relate to journalists’ reporting practices, and how these in turn produce framings in the press.
Based on content analysis of 390 press articles and interviews with twenty-one Dutch and French journalists, the article aims to bridge this conceptual divide. I highlight, first, the importance of agenda-setting by feminist politicians and organizations, which confirms scholarship on journalists’ tendency to relay the framings of “primary definers”—actors whose strong institutionalization empowers them to impose the primary definition of an issue. Second, the article points at specific characteristics of the organization of French and Dutch newsrooms, which made journalists in the former more inclined to employ feminist framings and gender beats.
Le féminisme dans les rédactions : Le harcèlement et sa (non-)définition comme question de genre dans les médias français et néerlandais
Alors que les concepts de violence sexiste et de domination masculine étaient largement absents des reportages néerlandais sur le harcèlement de rue, les cadrages féministes ont dominé les articles de presse sur cette question en France. Cette communication cherche à expliquer pourquoi, lors de nos entretiens, la plupart des journalistes néerlandais.es ont déclaré que présenter ce problème comme une question « féministe » relèverait d’un journalisme trop « idéologique », tandis que leurs homologues français.es ont expliqué adopter un vocabulaire féministe pour dénoncer celles et ceux qui « minimisent » le problème.
La recherche sur le féminisme et le journalisme se caractérise par un divorce conceptuel entre, d’une part, les études sur la représentation du féminisme et des questions de genre dans les médias, et, d’autre part, un ensemble plus restreint de travaux portant sur les opinions des journalistes en matière de féminisme. Nous entendons ainsi nous attaquer à un angle mort de la recherche en traitant de la façon dont ces idéaux sont liés aux pratiques de reportage des journalistes
Cette communication est fondée sur l’analyse qualitative de 390 articles de presse et celle d’entretiens avec 21 journalistes néerlandais.es et français.es. Il souligne, tout d’abord, l’importance de l’« agenda-setting » par des personnages politiques et des organisations féministes. La communication met également en évidence les caractéristiques spécifiques de l’organisation des salles de rédaction françaises et néerlandaises, qui mènent les journalistes des premières à utiliser davantage de cadrages féministes et des « gender beats ».
DESPONTIN-LEFÈVRE Irène – The #NousToutes survey on consent: building activist expertise on violence for the media
In addition to organising an annual march, the #NousToutes collective has been providing training on gender-based violence since 2018, in which experts and statistics are regularly presented. Organised around the objective of media coverage, #NousToutes is nevertheless obliged to produce an "effective" feminist discourse and translate its positions into journalistic terms. In 2020, #NousToutes is launching a survey on consent in heterosexual couples, and is working on building its media coverage in order to challenge public institutions and raise awareness on this issue. By wishing to raise this matter, the collective is however contributing to its normalisation: feminist critics underline the "universalisation of heterosexuality" that #NousToutes produces. Based on a (n)ethnographic research, this presentation examines the construction of sexist and sexual violence representations by a feminist collective responding to a media objective. After highlighting how the expertise proposed by #NousToutes partially erase the previous (feminist) productions, we will discuss the way in which the media framing of heterosexual women survey constructs this norm as the focus of sexist and sexual violence.
L’enquête de #NousToutes sur le consentement : construire une expertise militante sur les violences à destination des médias
En plus de l’organisation d’une marche annuelle, le collectif #NousToutes dispense depuis 2018 des formations sur les violences où sont régulièrement mobilisées la parole d’expert-es et des données chiffrées. Organisé autour d’un objectif de médiatisation, il reste néanmoins contraint de produire un discours féministe « efficace » et traduire ses positions en termes journalistiques. En 2020, #NousToutes lance une enquête sur le consentement dans les couples hétérosexuels dont il travaille à construire sa médiatisation pour interpeller les institutions publiques et sensibiliser sur cette question. En souhaitant faire émerger cette question, le collectif contribue néanmoins à la normer : des critiques féministes soulignent en effet l’« universalisation de l’hétérosexualité » qu’il opère. À partir d’un travail (n)ethnographique, cette communication revient sur la construction des représentations des VSS opérées par un collectif féministe répondant à un objectif de médiatisation. Après avoir souligné comment l’expertise proposée par #NousToutes participe à l’effacement de productions (féministes) préalables, il s’agira de revenir sur la manière dont le cadrage médiatique de l’enquête autour des femmes hétérosexuelles construit cette norme comme le foyer des violences sexistes et sexuelles.
DUBEC Sophie – Feminicide in the national daily press (2015-2020): towards a dilution of the systemic dimension of crimes?
In France, the term "feminicide" has recently taken a place in journalistic vocabulary, alongside problematic terms such as "crime passionnel" and "family drama" (Houel, 2013; Prenons la Une, 2014; Sapio, 2019; Dubec, 2021). This paper aims to investigate how this feminist framing of crime (Bodiou and Chavaud, 2019) has been appropriated by the print media. My study focuses on a corpus of 533 documents - grouping occurrences of the term "feminicide" in the national daily press (Aujourd'hui en France, La Croix, Le Figaro, L'Humanité, Le Monde, Libération) between 2015 and 2020 - and a representative sample of 206 documents, analyzed according to four variables: (1) country; (2) type of crime; (3) “eventization”; and (4) editorial lines. My preliminary results trace a transformation of meanings between 2015 and 2020: first used to refer to crimes outside the national community, "feminicide" refers from 2018-2019 onwards to murders of women by their (ex)spouses committed in France. They also show a general difficulty in preserving the structural dimension of the crimes: in the press, while feminicide does refer to the murder of a woman, it refers little, strictly speaking, to the murder of a woman because she is a woman.
Le féminicide dans la presse quotidienne nationale (2015-2020) : vers une dilution de la dimension systémique des crimes ?
En France, le terme « féminicide » a récemment pris une place dans le vocabulaire journalistique, aux côtés des expressions problématiques que sont le « crime passionnel » et le « drame familial » (Houel, 2013 ; Prenons la Une, 2014 ; Sapio, 2019 ; Dubec, 2021). Cette communication vise à étudier la façon dont ce cadrage féministe des crimes (Bodiou et Chavaud, 2019) a été appropriée par la presse écrite. Mon étude porte sur un corpus de 533 documents – regroupant les occurrences du terme « féminicide » dans la presse quotidienne nationale (Aujourd'hui en France, La Croix, Le Figaro, L'Humanité, Le Monde, Libération) entre 2015 et 2020 – et un échantillon représentatif de 206 documents, analysé selon quatre variables : (1) pays ; (2) type de crime ; (3) événementialisation ; (4) lignes éditoriales. Mes résultats préliminaires permettent de retracer une transformation des significations entre 2015 et 2020 : d’abord employé pour désigner des crimes extérieurs à la communauté nationale, le « féminicide » réfère à partir de 2018-2019 à des meurtres de femmes par leur (ex)conjoint commis en France. Ils soulignent également une difficulté générale à préserver la dimension structurelle des crimes : dans la presse, si le féminicide y renvoie bien au meurtre d’une femme, il réfère peu, à proprement parler, au meurtre d’une femme parce qu’elle est une femme.
GIORDANO Chiara – Online dating and sexual and gender-based violence: the role of “feminist” datingapps in reducing (or reinforcing) gender stereotypes and violence
The advent of the digital era has brought profound transformations in society in all parts of the world. With the evolution from Web 1.0 to Web 2.0 – which corresponds to a personalised ‘user-centric’ paradigm, which gave rise to social media, among other functionalities – it is no longer possible to assume that we use technology in a purely utilitarian way, without it affecting culture, human relationships and ethical values. Today, the omnipresence of online platforms and social media (such as Facebook, Instagram, Twitter, TikTok, to cite the most popular) raises important challenges and fuels the debate over their contradicting effects,including from a gender perspective: the ease of communication and the freedom of expression accessible to larger segments of the population, on the one hand, and all types of abusive online behaviours, on the other hand (polarisation and radicalisation of opinions, cyber harassment and violence, various types of online fraud, etc.). One of the most dramatic transformations of the digital era concerns the field of sexual and love relationships. Today, dating applications (dating apps) play an incontestable role in couple formation and intimate relationships and have generated important changes also from a gender perspective, which are not without contradictions. While they have great potential in terms of breaking codes linked to sex and love relationships and traditional gender roles, they may also contribute to reinforcing stereotypes on gender (but also on sexual orientation and race) and fuelling different forms of violence. This paper presents the exploratory work of a broad research focusing on the evolution of sex and love relationships through dating apps, from a gender perspective. By comparing different dating apps – with a focus on those with explicit “feminist intents” – in this paper I analyse three elements: i) whether dating apps characteristics (their functioning, their interfaces, the self-presentation of users) contribute to countering traditional gender norms and discourses about sexuality and femininity or whether they fix users into binary gender roles and reinforce gender stereotypes; ii) whether and how dating apps exacerbate (or reduce) gender-based violence and for which categories of users; and iii) whether the feminist intent of some dating apps is limited to counteract some forms of sexism, or whether on the contrary it contributes to raising knowledge or awareness about gender-related issues, including violence. The objective is to understand how gender-related discourses and feminist struggles are reflected on these apps and whether dynamics of sexual and gender-based violence are replicated in these virtual spaces.
Rencontres en ligne et violences sexistes et sexuelles : le rôle des applications de rencontres "féministes" dans la réduction (ou le renforcement) des stéréotypes de genre et de la violence
L'avènement de l'ère numérique a entraîné de profondes transformations de la société dans toutes les régions du monde. Avec l'évolution du Web 1.0 au Web 2.0 - qui correspond à un paradigme personnalisé "utilisateur-centré", qui a donné naissance aux médias sociaux, entre autres - il n'est plus possible de considérer que nous utilisons la technologie de manière purement utilitaire, sans qu'elle n'affecte la culture, les relations humaines et les valeurs éthiques. Aujourd'hui, l'omniprésence des plateformes en ligne et des médias sociaux (tels que Facebook, Instagram, Twitter, TikTok, pour citer les plus populaires) soulève des défis importants et alimente le débat sur leurs effets contradictoires, y compris dans une perspective de genre : la communication y est simplifiée et la liberté d'expression accessibles à de plus larges segments de la population, d'une part, mais d’autre part, on observe des comportements abusifs en ligne (polarisation et radicalisation des opinions, cyber-harcèlement et violence, divers types de fraude en ligne, etc.) L'une des transformations les plus spectaculaires de l'ère numérique touche au domaine des relations sexuelles et amoureuses. Aujourd'hui, les applications de rencontre (dating apps) jouent un rôle incontestable dans la formation des couples et des relations intimes, et elles ont généré des changements importants également du point de vue du genre, non sans contradictions. Si elles présentent un potentiel en termes de rupture des codes liés aux relations sexuelles et amoureuses et aux rôles traditionnels de genre, elles peuvent aussi contribuer à renforcer les stéréotypes sur le genre (mais aussi sur l'orientation sexuelle et la race) et alimenter différentes formes de violence. Cet article présente le travail exploratoire d'une vaste recherche portant sur l'évolution des relations sexuelles et amoureuses à travers les applications de rencontre, dans une perspective de genre. En comparant différentes applications de rencontre - avec un accent sur celles qui ont des "intentions féministes" explicites - j'analyse dans cet article trois éléments : i) si les caractéristiques des applications de rencontre (leur fonctionnement, leurs interfaces, la présentation de soi des utilisateurs) contribuent à contrer les normes de genre et les discours traditionnels sur la sexualité et la féminité ou si elles fixent les utilisateurs dans des rôles de genre binaires et renforcent les stéréotypes de genre ; ii) si et comment les applications de rencontre exacerbent (ou réduisent) la violence basée sur le genre et pour quelles catégories d'utilisateurs ; et iii) si l'intention féministe de certaines applications de rencontre se limite à contrer certaines formes de sexisme ou si, au contraire, elle contribue à accroître la connaissance ou la sensibilisation aux questions liées au genre, y compris la violence. L'objectif est de comprendre comment les discours liés au genre et les luttes féministes se reflètent dans ces applications et si les dynamiques de violence sexuelle et sexiste sont reproduites dans ces espaces virtuels.
Bibliography
Alabi O. A. (2019). Sexual violence laws redefined in the me too era: Affirmative consent &statutes of limitations. Widener L. Rev., 25, 69.
Arafah B., & Hasyim M. (2022). Social Media as a Gateway to Information: Digital Literacy on Current Issue in Social Media. Webology, 19(1), 2491-2503.
Bankov K. (2022). The Digital Mind. Semiotics explorations in digital culture. Cham: Springer.
Kaufmann J. C. (2010). Sex@mour. Paris: Armand Colin.
Biermé M. @ Declercq F. (2022). Cinq ans après #MeToo : balance ton quoi, un jour peut-être en Belgique ça changera. Le Soir (Viewed October 2022):
Bivens R., & Hoque A. S. (2018). Programming sex, gender, and sexuality: Infrastructural failures in ‘feminist’ dating app Bumble. Canadian Journal of Communication, 43(3), 441–459.
Boyle, K. (2019). # MeToo, Weinstein and feminism. In # MeToo, Weinstein and Feminism (pp. 1-20). Palgrave Pivot, Cham.
Butler J. (1990). Gender Trouble: Feminism and the Subversion of Identity. New York: Routledge.
Lott-Lavigna R. (2015). Bumble Is Tinder’s New Feminist Competitor. Does It Work? WIRED UK, http://www.wired.co.uk/article/bumble-feminist-dating-app.
MacLeod C. &McArthur V. (2019). The construction of gender in dating apps: an interface analysis of Tinder and Bumble. Feminist Media Studies, 19(6), 822-840.
Ranzini G. & Lutz C. (2016). Love at First Swipe? Explaining Tinder Self-Presentation and Motives. Mobile Media & Communication, 5(1), 80–101.
Reichel D. (2017). Determinants of intimate partner violence in Europe: The role of socioeconomic status, inequality, and partner behavior. Journal of interpersonal violence, 32(12), 1853-1873.
Roberts Y. (2019). # MeToo: The Harm and Limitations of Social Media in Modern Activism.
Rosenfeld, M. (2018). Are tinder and dating apps changing dating and mating in the USA?. In Families and technology (pp. 103-117). Springer, Cham.
Vuzharov M. (2019). UX & FOMO. Looking for love or looking for options?. In Digital Age in Semiotics & Communication, Vol. ІІ, 2019, Pp. 78–92.
Wu S., & Trottier D. (2022). Dating apps: a literature review. Annals of the International Communication Association, 1-25.
JAHJAH Marc – “Arab Master VS White Slut" - Investigating Hegemonic Masculinity and Sexual Racism in Male Dating Devices
I propose to report on several investigations carried out in recent years, around sexual racism and hegemonic masculinity in encounters between men on a gay network (Grindr) and on a more general one (Twitter). Because they represent historically, media-wise and socially the pinnacle of this masculinity (virility, heterosexuality, etc.), so-called racialised people are the object of a fetishism, which imposes on them a script, a programme of action, from which it can be difficult to escape in the hope of meeting someone. I was able to realise this in an auto-ethnography of my body on Grindr, which gave me access to new forms of expression of this racialised masculinity (veneration, eroticised fear, tokenisation, etc.). But it is now on Twitter, in interracial amateur pornography, that it is most spectacular: some (white) and others (Arab) are hyper-feminising and hyper-virilising to build asymmetrical pairs, which create a sexual tension that can be monetised in the media spaces. Thus, in order to seize opportunities and increase their sexual or economic capital, Arabs end up adjusting to the expectations of white people, who govern these spaces, by pretending to submit. Race and gender are articulated here in a complex way, as if coloniality (the residues of colonialism) had found a ruse: to create a fiction of partnership, which would benefit the descendants of colonisation, whose "power" is celebrated, even to the point of explicitly deifying them in votive games. Whiteness is made invisible by resorting to a feigned submission, which is achieved through feminisation.
How can this sexual racism, which prevents the expression of plural masculinities, be documented and even denounced, when it is perceived as an opportunity? What safeguards should be put in place when investigations are based on personal experience, which ends up encroaching on all aspects of personal and professional life? What expressive forms should be invented to make people hear and see what is minimised, naturalised and creates desire? And what are the alternative ways to arouse it, without going through colonial, homonormative and hegemonic scripts? In order to answer this question, I will resort to engaged autoethnographies, to research-creation as well as to queer and feminist epistemologies, which propose a new scientific ethos, another way of loving and living.
« Maître arabe VS salope blanche » – Enquêter sur la masculinité hégémonique et le racisme sexuel dans les dispositifs de rencontres entre hommes
Je propose de rendre compte de plusieurs enquêtes menées ces dernières années, autour du racisme sexuel et de la masculinité hégémonique dans les rencontres entre hommes sur un réseau gay (Grindr) et sur un autre plus généraliste (Twitter). Parce qu’ils représentent historiquement, médiatiquement, socialement l’acmé de cette masculinité (virilité, hétérosexualité, etc.), les personnes dites racisées font l’objet d’un fétichisme, qui leur impose un script, un programme d’action, dont il peut être difficile de se sortir pour espérer rencontrer. J’ai pu m’en rendre compte dans une auto-ethnographie de mon corps sur Grindr, qui m’a donné accès à des formes inédites d’expression de cette masculinité racialisée (vénération, crainte érotisée, tokénisation, etc.) Mais c’est aujourd’hui sur Twitter, dans la pornographie amateure interraciale, qu’elle est la plus spectaculaire : les uns (blancs) et les autres (arabes) s’hyper-féminisent et s’hyper-virilisent, s’hyper-racisent de part et d’autre, pour construire des paires asymétriques, qui créent une tension sexuelle monétisable dans les espaces médiatiques. Ainsi, pour saisir des opportunités et accroître leur capital sexuel ou économique, les arabes finissent par s’ajuster aux attentes des personnes blanches, qui gouvernent ces espaces, en faisant mine de se soumettre. Race et genre s’articulent ici de manière complexe, comme si la colonialité (les résidus du colonialisme) avait trouvé une ruse : créer une fiction de partenariat, qui se ferait au bénéfice des descendants de la colonisation, dont on célèbre la « puissance », jusqu’à les diviniser explicitement dans des jeux votifs. La blanchité s’invisibilise en recourant à une soumission feinte, qui passe par la féminisation.
Comment documenter, voire dénoncer ce racisme sexuel, qui empêche l’expression de masculinités plurielles, alors qu’il est perçu comme une opportunité ? Quelles protections mettre en place, lorsque les enquêtes sont notamment faites à partir de l’expérience personnelle, qui finit par empiéter sur tous les éléments de la vie intime et professionnelle ? Quelles formes expressives1 inventer pour faire entendre et voir ce qui est minimisé, naturalisé et qui crée du désir ? Et quelles voies alternatives pour le susciter, sans passer par les scripts coloniaux, homonormatifs et hégémoniques ? Pour y répondre, je recourrai aux auto-ethnographies engagées, à la recherche-création ainsi qu’aux épistémologies queers et féministes, qui proposent un nouvel éthos scientifique, une autre manière d’aimer et de vivre.
1 Voir par exemple les études de Hakeen (2021) et Peterson (2020) respectivement consacrées aux activistes 2Fik et Leah V sur Instagram.
Bibliography
ADJEPONG Anima, “Invading ethnography: A queer of color reflexive practice”, Ethnography, vol. 20, no 1, p. 27‑46, 2019.
ADAMS Tony E. et STACY Jones, “Autoethnography is a queer method”, Queer Methods and Methodologies: Intersecting Queer Theories and Social Science Research, p. 195-214, 2010.
ANZALDUA Gloria, Terres frontalières - La Frontera: La nouvelle mestiza, Paris, Cambourakis, 2022.
BELLACA Maria Puig de la, Les savoirs situés de Sandra Harding et Donna Haraway: Science et épistémologies féministes, Paris, Editions L’Harmattan, 2014.
COLLINS Patricia Hill, La pensée féministe noire : Savoir, conscience et politique de l’empowerment, Montréal, éditions du Remue-Ménage, [2009] 2016.
CONNELL R.W. et James W. MESSERSCHMIDT, « Hegemonic Masculinity: Rethinking the Concept », Gender & Society, 19(6), 2005, p. 829-859.
HAKEEN Hasheem, « Identités paradoxales et prétendument irréconciliables dans l’oeuvre de 2Fik : une polysémie désidentificatrice », International Journal of Canadian Studies, 58, 2021, p. 37-53.
HOOKS Bell, A propos d’amour : nouvelles visions, Mérignac, Editions Divergences, 2022
JAHJAH Marc, « “T’es intelligent pour un arabe !” Auto-ethnographie d’un corps colonisé – une épistémologie du mezzé libanais, Itinéraires, 2022.
LAROCHELLE Dimitra Laurence - “I think it was a rape…”: feminist podcasts as territories of resistance to sexist and sexual violence
Characterized by the intimacy between producers and listeners the podcast constitutes a quintessential territory both for exploring themes related to intimacy as well as for giving visibility to marginalized voices. In this sense, the podcast constitutes an alternative space of major political and cultural importance since it plays a prominent role in the production and circulation of counter-discourses and resistances within the public sphere. In this sense, the podcast provides a platform that lends itself to challenging the norms imposed by patriarchy. My study focuses on feminist podcasts and their potential as means of resistance to gender-based violence within French-speaking societies. This alternative medium, characterized not only by privacy but also by the ability of those who express themselves on it to maintain their anonymity, provides a space which is at the same time safe and intimate as well as a form of public expression. Feminist podcasts thus lend themselves to the sharing of individual experiences and the discussion of "taboo" topics. Taking these elements into consideration, I consider that feminist podcasts constitute spaces of resistance to gender-based violence as they contribute to the awareness-raising and denunciation of this phenomena. My results are based on a discourse analysis of French-speaking feminist podcasts as well as on interviews with podcasters.
« Je crois que c'était un viol… » : les podcasts féministes comme territoires de résistance aux violences sexistes et sexuelles
Marqué par l’intimité entre les producteur·rice·s et les auditeur·rice·s le podcast constitue un territoire par excellence à la fois pour explorer des thématiques en lien avec l’intime ainsi que pour accorder de la visibilité à des voix marginalisées. Dans ce sens, le podcast constitue un espace alternatif d’une importance politique et culturelle majeure puisqu’il joue un rôle prépondérant à la production et la circulation des contre-discours et des résistances au sein de la sphère publique. Le podcast constitue ainsi une plateforme qui se prête à la remise en question des normes imposées par le patriarcat. Notre étude porte sur les podcasts féministes et leur potentiel en tant que moyens de résistance face aux violences sexistes et sexuelles (VSS). Ce média alternatif caractérisé non seulement par l’intimité mais aussi par la possibilité accordée aux personnes qui s’y expriment de conserver leur anonymat, constitue un espace à la fois sécurisé et intime mais aussi une forme d’expression publique. Prenant en considération ces éléments, nous considérons que les podcasts féministes constituent des espaces de résistance aux VSS puisqu’ils contribuent à la sensibilisation et à la dénonciation de celles-ci. Nos résultats se basent sur une analyse du discours des podcasts féministes francophones ainsi que sur des entrevues avec des podcasteuses.
LUTONDE MWENE BATENDE Sandrine – The sexual violence issue in the media. Reception analysis of the show «Kinshasa Makambo» by Kinois
The present study aims to analyze the reception of the television program "Kinshasa Makambo" among the inhabitants of Kinshasa, Democratic Republic of Congo, with a view to comprehending the perception of its audience regarding the frequent exposure of sexual violence on the show. In order to fulfill this objective, a qualitative research approach was employed, utilizing semi-structured interviews as the main data collection method. A sample of 20 participants was selected, representing a diverse demographic of viewers, and data was analyzed using a thematic approach. The results of the study suggest a nuanced perception of the "Kinshasa Makambo" program among the inhabitants of Kinshasa. While some viewers expressed full support for the program's efforts to bring attention to the issues facing underprivileged areas of the city and to draw government attention to these problems, others expressed concern that the show reinforces patriarchal and sexist stereotypes in society and is unprofessional in its representation of sexual violence.
The findings of this study contribute to the ongoing discourse on the role of media in shaping public perceptions and attitudes towards sensitive issues such as sexual violence. Furthermore, it highlights the importance of media outlets engaging in ethical and responsible representation of sensitive topics, particularly in patriarchal societies.
In conclusion, this study provides valuable insights into the reception of the television program "Kinshasa Makambo" among the inhabitants of Kinshasa, and serves as a useful starting point for future research in this area.
Problématique de la violence sexuelle dans les médias. Une analyse de la réception de l’émission « Kinshasa Makambo » par les kinois
Notre recherche a porté sur l’analyse de la réception par les kinois de l’émission “Kinshasa Makambo” diffusée par la chaîne de télévision kinoise Molière TV. Il s'est agi de comprendre la perception des kinois par rapport aux reportages sur les violences sexuelles y médiatisées. L’approche qualitative a été le cadre de référence de notre étude. Nous avons mené des entretiens semi-directifs avec vingt personnes, représentant un public diversifié. De l’interprétation des résultats, il est apparu des perceptions mitigées quant à ladite émission. Si les uns adhèrent totalement à la vision du promoteur de ce média, celle d’attirer l’attention des gouvernants sur les problèmes qui minent les quartiers les plus reculés de Kinshasa, pauvres, dépourvus d’électricité, occasionnant ainsi une insécurité croissante (rançonnage, viols à domicile ou hors domicile, meurtres,…..), les autres plaident tout simplement pour la suppression de cette émission phare et pour cause : elle pècherait tant sur le plan de la forme que sur le fond. En effet, estiment cette seconde catégorie d’enquêtés, ces reportages sur les violences sexuelles sont tournés en amateur et renforcent les stéréotypes sexistes dans une société patriarcale. En conclusion, cette étude fournit des informations précieuses sur la réception de l’émission de télévision "Kinshasa Makambo" parmi les habitants de Kinshasa, et sert de point de départ utile pour de futures recherches dans ce domaine.
MARIÉ Léa – Investigating and publicizing the Patrick Poivre D'Arvor affair : which responsibilities for journalists ?
In a post-#Metoo context where the liberation of expression is taken for granted in media, what happens when it concerns an emblematic personality from the media industry ? Patrick Poivre d'Arvor (PPDA) presented for twenty years, every evening, the French news on the TF1 channel. On February 2021, Florence Porcel filed a complaint against him for rapes dating from 2004 and 2009. A liberation of expression leading nearly twenty women to testify in public, in the newspaper Libération and then during a special broadcast of Mediapart. But what do journalists risk by investigating a man whose reports show inaction from the TF1 television channel, or even protection ? While « everyone knew », what are the different responsibilities in the realization of an investigation participating in the removal of the omerta in the media environment ?
Starting from the analysis of the PPDA affair of Mediapart and the investigation of Libération revealing the accusations against PDDA, we question the approach of the journalists and their commitment in the realization of this investigation called of public interest, whereas this one
concerns an emblematic man of their professional environment. We are also interested in their accompaniment of the victims and in the importance given to the respect of the victims' voices in this context of liberation of speech and listening.
Enquêter et médiatiser l’affaire Patrick Poivre D’Arvor : quelles responsabilités pour les journalistes ?
Dans un contexte post-#Metoo où la libération de la parole est pensée comme acquise dans les médias, que se passe-t-il lorsqu’elle concerne une personnalité emblématique issue du monde des médias ? Patrick Poivre d’Arvor (PPDA) a présenté pendant vingt ans, tous les soirs, le journal télévisé français de la chaîne TF1. En février 2021, Florence Porcel porte plainte contre lui pour des viols datant de 2004 et de 2009. Une libération de la parole entrainant près d’une vingtaine de femmes à témoigner publiquement, dans le journal Libération puis lors d’une émission spéciale de Mediapart.
Mais qu’encourent les journalistes à enquêter sur un homme dont les récits démontrent une inaction de la part de la chaîne télévisée TF1, voir une protection ? Alors que « tout le monde savait », quelles sont les différentes responsabilités dans la réalisation d’une enquête participant à la levée de l’omerta dans le milieu médiatique ?
En partant de l’analyse de l’affaire PPDA de Mediapart et de l’enquête de Libération révélant les accusations contre PDDA, nous interrogeons la démarche des journalistes et leur engagement dans la réalisation de cette enquête dite d’intérêt public, alors que celle-ci concerne un homme emblématique de leur milieu professionnel. Nous nous intéressons également à leur accompagnement auprès des victimes et à l’importance accordée au respect de la parole de ces dernières dans ce contexte de libération de la parole et de l’écoute.
METSAGHO MEKONTCHO Boris – The low media coverage of sexual and gender-based violence related to the Anglophone conflict in Cameroon: analysis in the print and broadcast media
The socio-political crisis that has been raging in the South West and North West regions of Cameroon since 2016, mutated into armed secessionist conflict in 2017 and has given rise to crimes of rape and extreme sexual and gender-based violence, manifesting itself in several forms: sexual, physical, verbal, symbolic psychological and economic. These SGBV, despite their magnitude, do not receive a high media visibility especially in the print and broadcast media. However, the media have an important role to play in informing, explaining, raising awareness and denouncing the phenomenon. This media subcontracting limits the constitution of this phenomenon as a public problem and its placement on the governmental and international agenda. This paper therefore attempts to determine the logic behind the low media coverage of SGBV in the written and spoken press, as well as the consequences for the victims and communities affected. To do this, I use a qualitative approach that combines semi-structured interviews with journalists from the written and spoken press, activists from associations, NGO workers and humanitarians, and a documentary analysis of the written and spoken press devoted to the treatment of the aforementioned crisis. It uses a sociology of journalism, a study of the construction of public problems, and an analysis of the processes of setting the media agenda.
La faible médiatisation des violences sexuelles est sexiste liées au conflit anglophone au Cameroun : analyse dans la presse écrite et parlée
La crise sociopolitique qui sévit dans les régions du Sud-Ouest et Nord-Ouest du Cameroun depuis 2016, a muté en conflit armé sécessionniste en 2017 et a donné lieu à des crimes de viols et de violences sexuelles et sexistes extrêmes, se manifestant sous plusieurs formes : sexuelles, physiques, verbales, psychologiques symboliques et économiques. Ces VSS malgré leur ampleur, ne bénéficient pas d’une forte visibilité médiatique notamment dans la presse écrite et parlée. Pourtant, les médias ont un rôle important à jouer d’information, d’explication, de prise de conscience et de dénonciation du phénomène. Ce sous-traitement médiatique limite la constitution de ce phénomène en problème public et de sa mise sur agenda gouvernemental et international. Cette communication tente donc de déterminer les logiques présidant à la faible médiatisation de ces VSS dans la presse écrite et parlée, mais également les conséquences sur les victimes et les communautés touchées. Je mobilise pour ce faire une approche qualitative croisant entretiens semi-directifs avec des journalistes de la presse écrite et parlée, des militants d’associations, travailleurs d’ONG, humanitaires et l’analyse documentaire de la presse écrite et parlée consacrée au traitement de ladite crise. Elle fait recours à une sociologie du journalisme, à une étude de la construction des problèmes publics, à une analyse des processus de mise à l'agenda médiatique.
MORO Sabrina – Neoliberal feminism, a paradox: An analysis of Gretchen Carlson's and Megyn Kelly's sexual harassment testimonies at Fox News
This paper analyses the testimonies of two Fox News former news anchors, Gretchen Carlson and Megyn Kelly, who both exposed the then chairman Roger Ailes for sexual harassment. Carlson and Kelly shared their testimonies in memoirs (Settle for More 2016; Be Fierce 2017) which led to Ailes being ousted from Fox News in 2016. This case study is important in the genealogy of #MeToo because Ailes’ public fall from grace pre-dates Harvey Weinstein’s by only a year. From a theoretical perspective, this case study is interesting in that it casts two conservative media figures into feminist icons. Consequently, their testimonies demand an intersectional analysis that is not only attuned to their experiences of sexual violence but also to their underlying ideological implications. What iteration of feminism is at play in these celebrity testimonies of workplace sexual harassment?
This paper argues that Carlson’s and Kelly’s testimonies shed lights on the pervasiveness of sexual violence in the workplace, but at the same time also contribute to the depoliticization of feminist analysis of sexual violence. Whilst Carlson and Kelly contextualise their experience of sexual harassment within feminist scholarship and activism and well as legal and policy reforms, the solutions they put forward stem from self-help and/or corporate-friendly initiatives. Within this entrepreneurial framework, sexual violence is a concern insofar as it hinders productivity. These testimonies show how neoliberal ideology coopts feminist and activist lexicon, making a critique of neoliberal feminism difficult to sustain. The paper concludes with a reflection on the implications of critiquing these sexual harassment testimonies and their underlying conservative understandings of feminism from an intersectional feminist standpoint.
Les paradoxes du féminisme néoliberal: Une analyse des témoignages de Gretchen Carlson et Megyn Kelly dénonçant le harcèlement sexuel à Fox News
Cette communication porte sur les témoignages de deux ex-journalistes de Fox News, Gretchen Carlson et Megyn Kelly, qui ont dénoncé le harcèlement sexuel commis par le président de chaîne d’information de l’époque, Roger Ailes. Les témoignages de Carlson et Kelly ont été publicisés sous la forme de récits autobiographiques (Settle for More 2016; Be Fierce 2017) et ont mené au licenciement d’Ailes en 2016. Cette affaire est importante dans la généalogie de #MeToo en ce qu’elle constitue la première chute publique d’une figure médiatique, un an avant Harvey Weinstein. D’un point de vue scientifique, cette affaire est intéressante parce qu’elle consacre deux journalistes conservatrices en icône féministe. Par conséquent, leurs témoignages requièrent une analyse intersectionnelle attentive à la fois à leur vécu de violences sexistes et sexuelles (VSS) et critique des idéologies sous-jacentes. Quelle itération du féminisme est déployée à travers ces récits de harcèlement sexuel au travail? La thèse défendue dans cette communication est que les témoignages de Carlson et Kelly ont permis de révéler la prévalence des VSS en milieu de travail, mais contribue simultanément à dépolitiser une analyse féministe des VSS. Bien que Carlson et Kelly inscrivent leurs récits autobiographiques dans l’héritage de travaux scientifiques et mobilisations féministes, ainsi que de réformes légales et politiques autour de la question du harcèlement au travail, les solutions qu’elles préconisent relèvent du développement personnel et/ou de mesures corporatives qui n’abordent les VSS qu’en terme de menace pour la productivité de l’entreprise. Leurs témoignages illustrent la manière dont l’idéologie néolibérale se saisit du lexique féministe et militant et le détourne, rendant une critique du féminisme néolibéral difficile à soutenir. Une réflexion sur le processus d’analyse conclut la communication. Elle interroge comment aborder de manière critique ces témoignages de harcèlement sexuel à teneur traditionnaliste dans une démarche féministe intersectionnelle.
NAM JiMin – Alternative Media for Sexual and Gender-Based Violence (SGBV)? : For better journalism with feminist sensitivity and consciousness
The Korean phrase "Twitter feminist" in search engines comes with contemptuous words such as "[ugly] appearance," "punishment," "outcast," and "screwed." Instagram feminist accounts are also viewed with disgust. A South Korean celebrity 'liked' an Instagram post from a feminist account; she and the owner of the feminist account endured an online mob from a male-dominant online community. The post merely discusses the gender pay gap and the generous punishment that men face when they murder women partners. Yet, South Korean women and feminists continue to use social media for advocacy despite such strong contempt. The use of social media has accelerated digital feminism in recent years (Jeong and Lee 2018). Deliberately focusing on sexual violence, gender-based violence, and intimate partner violence, feminist Instagram accounts become alternative journalists. They screenshot and weave IPV, GBV, and SV stories to make a unique quilt of feminist news. In this paper, I explore how these violent incidents are covered differently in major newspapers and in these feminist Instagram accounts. These accounts highlight gendered violence that does not necessarily make a top headline in major newspapers. Most major newspapers do not view those incidents as newsworthy to report in extensive detail or regularly, but these feminist accounts do. By combining media, anthropological, and feminist perspectives (Lippmann 2017; Harding 2016; Hokkanen 2017), I argue that their activism/journalism dismantles epistemological authority. Journalism is inevitably subjective since humans, who have their own reflections, select incidents through human-made criteria of newsworthiness. Such a characteristic compels us to look for radically diverse perspectives in journalism.
Médias alternatifs et violences sexistes et sexuelles : pratiques journalistiques, sensibilités et consciences féministes
L'expression coréenne "féministe Twitter" dans les moteurs de recherche s'accompagne de termes péjoratifs tels que "moche", "punition", "paria" et "foutu"." Les comptes féministes Instagram sont également considérés avec dégoût. Une célébrité sud-coréenne a "aimé" un post Instagram d'un compte féministe ; elle et le propriétaire du compte féministe ont subi une foule en ligne d'une communauté en ligne à dominante masculine. Le post se contente de discuter de l'écart de rémunération entre les sexes et de la punition généreuse à laquelle les hommes s'exposent lorsqu'ils assassinent leurs partenaires féminines. Pourtant, les femmes et les féministes sud-coréennes continuent d'utiliser les médias sociaux pour défendre leurs intérêts malgré un tel mépris. L'utilisation des médias sociaux a accéléré le féminisme numérique ces dernières années (Jeong et Lee 2018). En se concentrant délibérément sur la violence sexuelle, la violence sexiste et la violence entre partenaires intimes, les comptes Instagram féministes deviennent des journalistes alternatifs. Ils font des captures d'écran et tissent des histoires de VPI, de VBG et de VS pour créer une courtepointe unique de nouvelles féministes. Dans cet article, j'explore comment ces incidents violents sont couverts différemment dans les grands journaux et dans ces comptes Instagram féministes. Ces comptes mettent en lumière la violence sexuée qui ne fait pas nécessairement la une des grands journaux. La plupart des grands journaux ne considèrent pas ces incidents comme dignes d'être rapportés de manière détaillée ou régulière, mais ces comptes féministes le font. En combinant les perspectives médiatiques, anthropologiques et féministes (Lippmann 2017 ; Harding 2016 ; Hokkanen 2017), je soutiens que leur activisme/journalisme démantèle l'autorité épistémologique. Le journalisme est inévitablement subjectif puisque les humains, qui ont leurs propres réflexions, sélectionnent les incidents en fonction de critères humains d'actualité. Une telle caractéristique nous oblige à rechercher des perspectives radicalement différentes dans le journalisme.
Bibliography
Al-Rawi, Ahmed, Alaa Al-Musalli, and Abdelrahman Fakida. 2021. “News Values on Instagram: A Comparative Study of International News.” Journalism and Media 2 (2): 305–20. https://doi.org/10.3390/journalmedia2020018.
Boellstorff, Tom. 2008. Coming of Age in Second Life: An Anthropologist Explores the Virtually Human. Princeton University Press.
Cernison, Matteo. 2018. Social Media Activism: Water as a Common Good. Protest and Social Movements. Amsterdam: University Press. https://doi.org/10.2307/j.ctvc77nv5.
De Benedictis, Sara, Shani Orgad, and Catherine Rottenberg. 2019. “MeToo, Popular Feminism and the News: A Content Analysis of UK Newspaper Coverage.” European Journal of Cultural Studies 22 (5–6): 718–38. https://doi.org/10.1177/1367549419856831.
Dumitrica, Delia, and Hester Hockin-Boyers. 2022. “Slideshow Activism on Instagram: Constructing the Political Activist Subject.” Information, Communication & Society 0 (0): 1–19. https://doi.org/10.1080/1369118X.2022.2155487.
Harding, Sandra. 2016. Whose Science? Whose Knowledge? Cornell University Press.
Hokkanen, Sari. 2017. “Analyzing Personal Embodied Experiences: Autoethnography, Feelings, and Fieldwork.” Translation & Interpreting 9 (1): 24–35. http://www.trans-int.org/index.php/transint/article/view/572.
Jackson, Sue. 2018. “Young Feminists, Feminism and Digital Media.” Feminism & Psychology 28 (1): 32–49. https://doi.org/10.1177/0959353517716952.
Jeong, Euisol, and Jieun Lee. 2018. “We Take the Red Pill, We Confront the Dicktrix: Online Feminist Activism and the Augmentation of Gendered Realities in South Korea.” Feminist Media Studies 18 (4): 705–17. https://doi.org/DOI: 10.1080/14680777.2018.1447354.
Joohee, Kim, and Jamie Chang. 2021. “Nth Room Incident in the Age of Popular Feminism: A Big Data Analysis.” Azalea: Journal of Korean Literature & Culture 14 (14): 261–87. https://doi.org/10.1353/aza.2021.0016.
Lippmann, Walter. 2017. Public Opinion. New York: Routledge. https://doi.org/10.4324/9781315127736.
Meyers, Marian. 1996. News Coverage of Violence against Women: Engendering Blame. Thousand Oaks, Calif. ;, London: SAGE.
PEUCHAUD, SHEILA. 2014. “Social Media Activism and Egyptians’ Use of Social Media to Combat Sexual Violence: An HiAP Case Study.” Health Promotion International 29 (suppl 1): i113–20. https://doi.org/10.1093/heapro/dau046.
Talbot, Catherine V., and Madeleine Pownall. 2022. “‘If Your Institution Refuses to Provide What You Need, Create It Yourself’: Feminist Praxis on #AcademicTwitter.” Feminism & Psychology 32 (1): 101–18. https://doi.org/10.1177/09593535211052234.
Tuchman, Gaye. 1978. Making News: A Study in the Construction of Reality. New York: Free Press.
Unterberger, Andrew. 2018. “Instagram Activism.” Billboard 130 (28): 58–58.
Wei Xue, Aviva, and Kate Rose. 2022. Weibo Feminism: Expression, Activism, and Social Media in China. London: Bloomsbury Academic.
PRIGENT Pierre-Guillaume & SUEUR Gwénola – From falsely accused fathers to children in need of protection: a textual analysis of the press devoted to the notion of parental alienation (1999-2022)
In France, the expression "parental alienation" appeared in the press in 1999, in a context of mobilization of fathers falsely accused of incestuous sexual violence. Defended by psychologists, and propagated by groups defending fathers' "rights", "parental alienation" is mentioned in the media discourse concerning the separation of parents, and is diffused in family justice and child protection. Criticized for its lack of scientific basis and for the risks linked to its use in situations of violence, the theory remains mobilized in civil proceedings.
Based on a textual analysis of the press, we propose to identify the lexical worlds associated with the periods of emergence, institutionalization and contestation of the notion. The corpus consists of more than 500 articles published in France, available on Europresse, containing the terms "parental alienation".
When the notion emerges, the articles are mainly announcements of meetings or actions of fathers' groups, and portraits of "victim" fathers. In a second phase, the terms that emerge are related to family law and co-parenting, a sign of the institutionalization of the notion, even though it is contested. In a third stage, the terms are associated with the theme of sexual violence against children, in connection with their greater media coverage.
The textual analysis of the press dealing with a concealing category, in the post-conjugal context, of sexist and sexual violence, shows that its social use is shaped by antagonistic communicational power relations.
Des pères faussement accusés aux enfants à protéger : une analyse textuelle de la presse consacrée à la notion d'aliénation parentale (1999-2022)
En France, l'expression "aliénation parentale" apparaît dans la presse en 1999, dans un contexte de mobilisation de pères se présentant comme faussement accusés de violences sexuelles incestueuses. Défendue par des psychologues, et propagée par les groupes de défense des "droits" des pères, l "'aliénation parentale" est mentionnée dans les discours médiatiques concernant la séparation des parents, et se diffuse dans la justice aux affaires familiales et la protection de l'enfance. Critiquée pour son absence de fondement scientifique et pour les risques liés à son utilisation dans les situations de violences, la théorie reste mobilisée dans les procédures civiles.
Nous proposons, à partir d'une analyse textuelle de la presse, d'identifier les mondes lexicaux associés aux périodes d'émergence, d'institutionnalisation et de contestation de la notion. Le corpus est constitué de plus de 500 articles publiés en France, disponibles sur Europresse, contenant les termes "aliénation parentale".
Lorsque la notion émerge, les articles sont principalement des annonces de réunions ou d'actions de groupes de pères, et des portraits de pères "victimes". Dans un second temps, les termes qui ressortent sont relatifs au droit de la famille et à la coparentalité, signe de l'institutionnalisation de la notion pourtant contestée. Dans un troisième temps, les termes sont associés au thème des violences sexuelles contre les enfants, en lien avec leur médiatisation plus importante.
L'analyse textuelle de la presse abordant une catégorie occultante, dans le cadre post-conjugal, des violences sexistes et sexuelles, montre que son usage social est façonné par des rapports de force communicationnels antagonistes.
REUS Muriel et THIMOREAU Cécile - Presentation of the activities of the MeTooMedia association
METOOMEDIA fights against sexist and sexual violence in the media, for the benefit of the whole society. The media, the 4th power, has a definite influence on public opinion. As such, their responsibility in the diffusion of gendered stereotypes, or beliefs can participate in establishing a rape culture, or on the contrary, in lifting it.
The reality experienced in the editorial offices and organizations, the internal practices, have some effects on the messages conveyed. Thus, our mission is to act both against sexist and sexual violence in the media and for the dissemination of a shared, virtuous culture, which facilitates respectful relations between women and men.
Our association, created in November 2021, brings together women and men committed to serving the general interest. It also includes legal entities: the National Union of Journalists, Women Journalists in Sport, Women with.
We develop several types of actions:
Collection of victims' words, moral and financial support, orientation
Creation of an expert training for journalism schools and media companies
Creation of awareness campaigns and tools
In 2023, we are supported in our actions by the Ministry of Equality between women and men, and by the Fondation des Femmes.
Présentation des activités de l'association MeTooMedia
METOOMEDIA lutte contre les violences sexistes et sexuelles au sein des médias, au service de l’ensemble de la société. Les médias, 4ème pouvoir, exercent une influence certaine sur l’opinion publique. A ce titre, leur responsabilité dans la diffusion de stéréotypes genrés, ou de croyances peuvent participer à établir une culture du viol, ou au contraire, à la lever. La réalité vécue dans les rédactions et organisations, les pratiques internes, ont une portée sur les messages véhiculés. Ainsi, notre mission est d’agir à la fois contre les violences sexistes et sexuelles dans les médias et pour la diffusion d’une culture partagée, vertueuse, qui facilite des relations femmes/hommes respectueuses.
Notre association, créée en novembre 2021, regroupe des femmes et des hommes engagés au service de l’intérêt général. Elle accueille également des personnes morales : le Syndicat national des journalistes, Femmes journalistes dans le sport, Femmes avec.
Nous développons plusieurs types d’actions :
Recueil de la parole de victimes, soutien moral et financier, orientation
Création d’une formation experte à destination des écoles de journalisme et des entreprises médiatiques
Création de campagnes et d’outils de sensibilisation
En 2023, nous sommes soutenus dans nos actions par le Ministère de l’égalité entre les femmes et les hommes, et par la Fondation des femmes.
RUFFIO Claire - “Judging on a case-by-case basis" ? The impact of the law on the individualization of the journalistic framing of rape in the French press (1980-2020)
How does the legal framework surrounding any media publication contribute to individualizing the journalistic framing of rape? By covering only rape cases that have been reported to the police, court reporters ensure that they avoid libel lawsuits, and prove the newsworthiness of stories usually regarded as intimate affairs. However, because it contributes to ignoring the most common sexual and gender-based violence that is statistically less prosecuted, this unofficial journalistic rule is now being criticized inside and outside the media. In response to this discussion, some of the most widealy read national newspapers have recently published a new genre of content, which has been particularly promoted by journalists seeking to politicize the journalistic framing of sexual violence. These special investigations are called « self-initiated », because these journalists report on rapes that have not been previously reported to the police. Nevertheless, one can observe how difficult it seems for journalists to break free from legal norms, as these innovative formats must meet the standards of legal evidence to be deemed trustworthy. In order to demonstrate these findings, this presentation is based on twenty ethnographic observations and fifty-five interviews with journalists who cover sexual violence and with their key interlucutors (judicial, associative and health professionals). As part of our ongoing doctoral work, 6 000 media contents from fourteen different French newspapers were also analyzed to determine the evolution of the journalistic framing of rape between 1980 and 2020.
« Juger au cas par cas » ? L'influence du droit sur l'individualisation du cadrage journalistique du viol par la presse écrite française (1980-2020)
Comment l’importance accordée par les rédactions au cadre légal entourant toute publication médiatique contribue-t-elle à l’individualisation du cadrage journalistique du viol ? En veillant à ne relayer que des faits de viols judiciarisés et à ne citer que les pièces et parties du dossier, faits-diversiers et chroniqueurs judiciaires s’assurent tout à la fois de réduire le risque de procès en diffamation, et de justifier l’intérêt public de récits jusque-là perçus comme relevant du domaine de l’intime. Parce qu’elle participe cependant de l’invisibilisation des violences sexuelles et sexistes statistiquement les plus communes, moins fréquemment portées devant la justice, la règle dite du « dépôt de plainte » fait l’objet de critiques externes comme internes aux rédactions. Illustration de ce mouvement récent, la poursuite inédite d’enquêtes dites « d’initiative » (en ce qu’elles portent sur des faits non judiciarisés) témoigne de la mobilisation de journalistes engagées en faveur de la politisation du cadrage journalistique des violences sexuelles et sexistes. L’évaluation de la fiabilité de ces formats novateurs, principalement fondée sur les critères de l’administration de la preuve juridique, éclaire cependant la difficile autonomisation du champ journalistique à l’égard du champ juridique en matière de couverture de faits criminels. Cette présentation s’appuie sur la conduite de cinquante-cinq entretiens semi-directifs et d’une vingtaine d’observations auprès des principaux co-producteurs de l’information sur le viol (journalistes et sources judiciaires, associatives et de santé), ainsi que sur l’analyse de près de 6 000 Unes et articles relayés par quatorze journaux d’information générale et spécialisée.
SADAF Shomaila & TAHIRA Anwar – Femicide and violence against women in Pakistani print media : A multimodal framing analysis
In the recent past, the media coverage of violence against women also known as femicide has been on a rise in Pakistan. Pakistan ranks as the sixth most dangerous country in the world for women, with rampant reports of sexual crimes and domestic violence. In the recent times, two instances of domestic murders committed by the educated urban elite of the country’s capital captured the attention of the nation as well as news media. One of the cases, took place on July 20th, 2021, while the other was reported on September 24th, 2022, in Pakistan.
The main aim of the research is to study the multimodal framing of news stories and pictures of the victims and perpetrators in Dawn newspaper. We found around 800 news stories about the incidents, out of which we analyzed first 100 news stories. This research study answers the question of how Dawn newspaper frames gendered-based violence stories in Pakistan. This study uses Framing analysis (Gamson, 1988), that places the analysis of news text in a theoretical framework built on the point of convergence between the sociological and cognitive formulations of the frame concept (Pan & Kosicki, 1993). The approach used for the present study was multimodal such each of the modes has the potential to provide a great deal of information (Kress & van Leeuwen, 1996).
Le féminicide et les violences contre les femmes dans la presse écrite pakistanaise : une analyse multimodale du cadrage médiatique
Ces derniers temps, la couverture médiatique de la violence à l'égard des femmes, dont celle des "féminicides", a augmenté au Pakistan. Le Pakistan se classe au sixième rang des pays les plus dangereux au monde pour les femmes, avec de nombreux cas de crimes sexuels et de violences domestiques. Récemment, deux cas de meurtres domestiques commis par l'élite urbaine éduquée de la capitale du pays ont retenu l'attention de la nation et des médias. L'un de ces cas a eu lieu le 20 juillet 2021, tandis que l'autre a été signalé le 24 septembre 2022, au Pakistan.
L'objectif principal de cette recherche est d'étudier le cadrage multimodal des articles et des photos des victimes et des auteurs dans le journal Dawn. Nous avons trouvé environ 800 nouvelles sur les incidents, dont nous avons analysé les 100 premières. Cette étude vise à savoir comment le journal Dawn cadre-t-il les histoires de violences basées sur le genre au Pakistan. Cette étude mobilise l'analyse du cadrage (Gamson, 1988), qui place l’étude du texte des nouvelles dans un cadre théorique construit sur le point de convergence entre les formulations sociologiques et cognitives du concept de cadre (Pan & Kosicki, 1993). L'approche utilisée pour la présente étude est multimodale, chacun des modes étant susceptible de fournir un grand nombre d'informations (Kress & van Leeuwen, 1996).
SALMON Aïcha – "I am married to a violent and wicked man". Testimonies of women readers of the daily newspaper Le Matin on domestic violence (1908)
In 1908, one of the most widely read daily newspapers of the Belle Époque in France, Le Matin, published an important investigation about married life. Journalist Gustave Téry coordinated the project which included interviews, editorials and opinion articles but also letters to the editor written by male and female readers who were invited to give their opinions on marriage and divorce. Téry presented these 'ordinary' personal writings as 'the most complete, instructive and moving contribution to the history of the mores of this time'. Some of these letters from women readers explicitly mentioned marital violence: they dared to express themselves in first person about the blows, the insults, and the bullying they endured. They also wrote about the marital duty to which they were bound; and the difficulties they encountered when they wanted to separate from a violent or abusive husband.
The aim of this paper is to trace this unusual media investigation that highlighted personal accounts. It presents an analyse of the content of the letters from women readers who reported violence committed by their husbands. Further, it looks at why the press and its readers were interested in publishing, writing and reading these life stories, which revealed the secrecy of the home in the public space of the newspaper.
"Je suis mariée à un être violent et méchant". Témoignages de lectrices du quotidien Le Matin sur les violences conjugales (1908)
En 1908, dans Le Matin, un des quotidiens les plus diffusés de la Belle Époque, une vaste enquête sur la vie conjugale est menée par le journaliste Gustave Téry. Des interviews, des éditoriaux et des articles d’opinion sont publiés, mais c’est surtout le courrier des lecteurs et des lectrices, invité.e.s à écrire pour donner leur avis, qui est au centre de l’attention. La rédaction du journal présente ce déploiement de paroles intimes « ordinaires » comme « la plus complète, la plus instructive, la plus émouvante contribution à l’histoire des mœurs de ce temps ». Certaines de ces lettres de lectrices évoquent explicitement des violences conjugales : des femmes osent ainsi évoquer à la première personne les coups reçus, les insultes, les brimades mais aussi le devoir conjugal auquel elles sont astreintes ; elles font également part des difficultés rencontrées quand elles veulent se séparer d’un mari violent ou maltraitant.
Cette communication a pour objectif de retracer le dispositif de l’enquête médiatique qui suscite la production de ces témoignages personnels inhabituels, et d’analyser plus avant la teneur des lettres de lectrices qui font part des violences exercées par leur conjoint. Elle s’intéresse aux intérêts qu’ont d’une part la presse et d’autre part les lectrices à publier, écrire ou lire ces récits de vie, qui dévoilent dans l’espace public des médias ce qui reste habituellement reste dans le secret des foyers.
SCHUMMER Baptiste – Speaking up. Showing-off. Legislating. Networks and reasons for the media path of sexist and sexual violence in France (2000-2020)
This paper aims to apprehend the logics of media (de)construction of the public problem of SGB. This triptych thus describes the different sequences or operations (Neveu, 2015) of making SGBV visible in the French media. Giving its voice for victims of violence and cause entrepreneurs, speaking up to journalists so that they can show them to the general public and to the authorities to take into account this public problem and tolegislate. However, the (non) public problematization of SGBV, as an object of social, symbolic and professional struggles, is constantly reshaped according to their media career and the different "owners" (Gusfield, 1981) who claim a definitional monopoly on them. The identification of the different media peaks of a selection of occurrences attempting to cover as much as possible the protean character of the most mediatized SGBV (rape, sexual harassment, sexual assault, #MeToo, #Balancetonporc, LigueduLOL) seemed to us to be an effective instrument for reconstructing the networks of operators (Hilgartner and Bosk, 1988) at work during these pivotal moments of (re)problematization of SGBV in the public debate. More than these networks, this paper aims to identify the reasons that structure these coalitions, whether they are circumstantial or lasting, i.e. to demonstrate that they rest on shared ideological foundations and common (di)visions of the world, which it is particularly heuristic to analyze.
Donner sa voix. Donner à voir. Donner la loi. Réseaux et raisons de la carrière médiatique des violences sexistes et sexuelles en France (2000-2020)
Cette communication vise à appréhender les logiques de (dé)construction médiatique du problème public des VSS. Ce triptyque décrit ainsi les différentes séquences ou opérations (Neveu, 2015) de mise en visibilité des VSS dans les médias français. Donner sa voix pour les victimes de violences et les entrepreneuses et entrepreneurs de cause aux journalistes afin qu’elles et ils puissent les donner à voir au grand public, contraint les pouvoirs publics et judiciaires à prendre en compte ce problème public et à donner la loi. Cependant, les mises en (non) problème public des VSS, en tant qu’objet de luttes sociales, symboliques et professionnelles, sont sans cesse remodelées au gré de leur carrière médiatique et des différents « propriétaires » (Gusfield, 1981) qui s’en attribuent le monopole définitionnel. L’identification des différents pics médiatiques d’une sélection d’occurrences tentant de recouvrir au maximum le caractère protéiforme des VSS les plus médiatisées (viol, harcèlement sexuel, agression sexuelle, #MeToo, #Balancetonporc, LigueduLOL) nous a semblé constituer un instrument efficace dans le but de reconstituer les réseaux d’opérateurs (Hilgartner et Bosk, 1988), à l’œuvre durant ces moments charnières de (re)problématisation des VSS dans le débat public. Plus que ces réseaux, cette communication a pour ambition de repérer les raisons qui structurent ces coalitions, qu’elles soient circonstancielles ou durables, c’est-à-dire de démontrer qu’ils reposent sur des fondements idéologiques partagés et des (di)visions du monde communes, qu’il est particulièrement heuristique d’analyser.
STOICA Diana – The violence against women in the Romanian online press - comparative approach: before, during and after the COVID-19 pandemic
Abstract: During the COVID-19 pandemic, the whole of society has been forced to find ways and solutions to face and overcome the inconveniences that have arisen due to the health crisis. All the restrictions imposed by Governments have made the situation of women victims of domestic violence more difficult than before. The statistics drawn up by the Romanian authorities (National Police, National Gendarmerie, Ministry of Health, etc.) have underlined the enormous and unprecedented growth of cases targeting women or girls beaten by their husbands or by their fathers. This analysis represents an exploratory study encompassing articles published in the Romanian online press (quality press and tabloid press) during the health crisis, more specifically during the year 2020, which present violent situations to which Romanian women were exposed. The main objectives of this article are to present the Romanian context before, during and after the pandemic, to identify the actors and the recurring themes mentioned by the journalists and also to observe the general context, the representation of the events, the portrait of the victim vs. of the aggressor, the absence or, on the contrary, the presence of sensationalism and the language used by the journalist to describe the incidents. To achieve these objectives, two research methods adapted to the selected corpus were chosen: thematic content analysis and critical discourse analysis. The conclusions of this analysis will be directed towards the differences and similarities identified in the selected articles and especially on the presentation of the cases in relation to the health crisis.
La violence envers les femmes dans la presse roumaine en ligne – approche comparative: avant, pendant et après la pandémie de COVID-19
Résumé : Pendant la pandémie de COVID-19, toute la société a été obligée de trouver des modalités et des solutions pour faire face et surpasser les inconvénients parus à cause de la crise sanitaire. Toutes les restrictions imposées par les Gouvernements ont rendu la situation des femmes victimes des violences conjugales plus difficile qu’auparavant. Les statistiques rédigées par les autorités roumaines (Police Nationale, Gendarmerie Nationale, Ministère de la Santé, etc.) ont souligné la croissance énorme et sans précédent des cas visant des femmes ou filles battues par leurs époux ou bien par leurs pères. Cette analyse représente une étude exploratoire englobant des articles parus dans la presse en ligne roumaine (presse de qualité et presse tabloïde) pendant la crise sanitaire, plus précisément pendant l’année 2020, qui présentent des situations violentes auxquelles étaient exposées des femmes roumaines. Les objectifs principaux de cet article sont de présenter le contexte roumain avant, pendant et après la pandémie, d’identifier les acteurs et les thématiques récurrentes mentionnées par les journalistes et aussi d’observer le contexte général, la représentation des événements, le portrait de la victime vs. de l’agresseur, l’absence ou bien, au contraire, la présence du sensationnalisme et le langage utilisé par le journaliste afin de décrire les incidents. Pour que ces objectifs soient atteints, on a choisi deux méthodes de recherche adaptées au corpus sélectionné : l’analyse thématique de contenu et l’analyse critique de discours. Les conclusions de cette analyse seront dirigées vers les différences et les similarités identifiées dans les articles sélectionnés et surtout sur la présentation des cas par rapport à la crise sanitaire.
VILLANI Michela – Exposing sexual violence in Switzerland: the collaborative work in the realisation of the project "Nous en avons assez"
The Swiss National Council recently voted in favour of revising the criminal law on sexual violence. In the parliamentary debate on 5 December 2022, a clear majority voted in favour of the solution advocated in the "Only yes means yes" campaign for the crime of sexual assault. Previously based on the so-called "opposition solution", where only sexual intercourse committed against a person's expressed will was punishable, this new definition of sexual assault in Swiss sexual criminal law places consent at the centre. The principle of consent is already the law in 14 European countries : Belgium, the UK, Iceland, Luxembourg, Malta, Sweden, Cyprus, Greece, Denmark, Slovenia, Ireland, Croatia, Spain and Finland. However, in other legal systems, such as France and Italy, the law continues to define sexual assault through the principle of constraint and the victim's refusal (to be proven) to the sexual intercourse.
Amnesty International has taken up this issue and conducted a campaign in Switzerland. In this context, the NGO commissioned a working group to produce an exhibition entitled "We have enough! Victims of sexual violence break myths, taboos and stigmas". The exhibition, which is currently circulating in Switzerland, consists of 15 photo posters and 7 stories of sexual violence. It is a collaborative project bringing together artists (a photographer, a graphic designer, a writer-journalist), activists and women victims of sexual violence. The aim of this work is to show the diversity of situations in which sexual violence occurs and thus thwart the preconceived ideas and "myths" associated with sexual violence, and to make visible the multiple, long-lasting and traumatic consequences of sexual violence on the lives of those concerned.
While these women (artists, activists, victims of sexual violence) are united by a common cause (the fight against sexual violence), their postures and their relationship to the object differ: for the former, it is a question of asserting an artistic work and intellectual property, for the latter, it is a question of exposing their intimacy, reactivating traumatic memories in a process of self-reconstruction, and for the latter, it is a question of using a visual and textual medium to make a plea to political decision-makers. How are the sensibilities of the two groups articulated in the creation of an exhibition ? How are the aesthetic choices of the images and the textualisation of the stories negotiated ?
This communication will focus on the process of developing, producing and displaying an exhibition on sexual violence. The aim is to provide a reflexive overview of the choice of visual and textual supports as an example of awareness-raising devices on sexual violence (Salles 2021 ; Sapio 2022). The participatory approach (Lecam & Ruellan 2017 ; Romero 2020) will also be analysed through interviews with the actresses: their relationship to the object (the exhibition), their participation in the formatting (the production of images and texts) and their affective relationship with the work carried out will be questioned.
Exposer les violences sexuelles en Suisse : le travail collaboratif dans la réalisation du projet "Nous en avons assez"
Le Conseil national suisse s’est prononcé tout récemment en faveur de la révision du droit pénal en matière sexuelle. Lors du débat parlementaire du 5 décembre 2022, une nette majorité s’est prononcée en faveur de la solution défendue dans la campagne « Seul un oui est un oui » dans l’infraction de viol. Jusqu’alors basait sur la solution dite « d'opposition », où seuls les rapports sexuels commis contre la volonté exprimée d'une personne sont punis, cette nouvelle définition du viol dans le droit pénal sexuel suisse, place le consentement au centre. Le principe du consentement fait déjà loi dans 14 pays européens : la Belgique, le Royaume-Uni, l’Islande, le Luxembourg, Malte, la Suède, Chypre, la Grèce, le Danemark, la Slovénie, l’Irlande, la Croatie, l'Espagne et la Finlande. Dans d’autres systèmes juridiques, comme en France et en Italie, le viol continue à être défini par la loi à travers le principe de la contrainte et le refus de la victime (à prouver) à la relation sexuelle.
Amnesty international s’est emparé de cette question et a mené en Suisse une campagne. Dans ce cadre, cette ONG a mandaté un groupe de travail pour réaliser une exposition intitulée « Nous en avons assez ! Les victimes de violences sexuelles brisent mythes, tabous et stigmates ». L’exposition, actuellement en circulation en Suisse, se compose de 15 posters photo et 7 récits de viols. Il s’agit d’un projet collaboratif réunissant des artistes (une photographe, une graphiste, une écrivaine-journaliste), des militantes et des femmes victimes de violences sexuelles. Ce travail se propose de montrer d’une part la diversité de situations au sein desquelles les viols se produisent et déjouer ainsi les idées reçues et les « mythes » associés aux violences sexuelles, d’autre part souhaite visibiliser les conséquences multiples, durables et traumatisantes des violences sexuelles sur la vie des personnes concernées.
Si ces actrices (des femmes artistes, militantes, victimes des violences sexuelles) sont réunies par une cause commune (lutte contre les violences sexuelles) leurs postures et leurs relations à l’objet diffèrent : pour les premières il s’agit de faire valoir un travail artistique et une propriété intellectuelle, pour les deuxièmes s’agit d’une mise à nu de leur intimité réactivant des souvenirs traumatiques dans un processus de reconstruction de soi, pour les dernières s’agit d’un support visuel et textuel permettant d’exercer un plaidoyer auprès des décideurs politiques. Comment s’articulent les sensibilités des unes et des autres dans la réalisation d’une exposition ? Comment se négocient les choix esthétiques des images et la mise en texte des récits ?
Cette communication s’intéresse au processus d’élaboration, de réalisation et d’utilisation d’une exposition sur les violences sexuelles. Il s’agira d’apporter un regard réflexif sur les choix des supports visuels et textuels comme exemple de dispositifs de sensibilisation aux violences sexuelles (Salles 2021 ; Sapio 2022). Il sera également question d’analyser l’approche participative (Lecam & Ruellan 2017 ; Romero 2020) à travers des entretiens réalisés avec les actrices : leur rapport à l’objet (l’exposition), leur participation à la mise en forme (la production d’images, de textes) et leur rapport affectif vis-à-vis du travail réalisé seront questionnés.
Bibliography
Lecam F., Ruellan R. (2017). Émotions de journalistes. Sel et sens du métier. Grenoble : Presses universitaires de Grenoble.
ROMERO, D. F. (2020) Spain’s campaigns against gender violence : The effect on abused women’s identities from the victim–agent dichotom. Journal of Gender Studies, 2(29) :146‑160.
Salles, C. (2021). Le rôle des représentations visuelles et audiovisuelles dans la reconnaissance de la notion de ‘violences obstétricales’ en France et en Belgique. Santé Publique 33(5) : 655-662.
Sapio G. (2020). Victimes de violences conjugales face aux campagnes institutionnelles entre ventriloquie, injonctions et paradoxes. Études de communication, 54 : 53-70.
VUILLE Valérie – Media Coverage of gender-based violence. Raising awareness through fieldwork and diverse representation
Since 2016, decadréE has been offering concrete courses of action based on dialogue, training and awareness-raising for journalists. Studies conducted within the institute feed into its various awareness-raising actions.
To what extent does awareness-raising improve media coverage of gender-based violence? Which awareness-raising actions best meet journalists’ constraints and have an effective and lasting impact on content creation? We propose to link the results and hypotheses derived from the statistics to the realities in the field and to the qualitative findings of our work.
Our strategy for raising journalists' awareness of gender-based violence is based on both pre-existing quantitative analyses of different forms of gender-based violence, such as domestic violence (1999: Guérard and Lavender , 2012: Eaves, 2019: Sepulchre) and rape (1997: Meyers, 1995: McCormick), studies of the narratives and myths around gender-based violence (1997:Madriz, 2021:Lochon) and their influence on the work of the media and justice (2019: Lieber), as well as empirical knowledge of journalism work and its constraints.
By conducting several analytical studies between 2019 and 2022, decadréE was able to hypothesize that problematic elements can be explained through a combination of individual (journalists' sensibilities), structural (the editorial framework and line), and systemic (cultural constructs surrounding violence) issues. The organization of newsrooms, constraints in terms of time and resources, as well as the constraint to use certain format or images influence the media coverage of gender-based violence. Moreover, knowledge of the specific codes of journalistic writing allows for a better understanding of an article’s quality as well as its inherent biases.
Traitement médiatique des violences sexistes. Construire une sensibilisation ancrée dans la réalité du terrain et la diversité des représentations
Depuis 2016, décadréE offre des pistes d’actions concrètes basées sur le dialogue, la formation et la sensibilisation des journalistes. Les études menées au sein de l’institut alimentent les différentes actions de sensibilisation.
Aussi, dans quelle mesure la sensibilisation permet-elle une amélioration du traitement médiatique des violences sexistes ? Quelles sont les actions de sensibilisation répondant au mieux aux contraintes des journalistes et impactant de manière efficace et pérenne la création des contenus ? Nous proposons ainsi de mettre en relation les résultats et les hypothèses découlant des faits statistiques avec la réalité du terrain et les constats qualitatifs fruits de notre travail.
Notre stratégie de sensibilisation des journalistes aux violences sexistes se base à la fois sur les analyses quantitatives préexistantes portant sur différentes formes de violences sexistes, comme les violences conjugales (1999 : Guérard et Lavender , 2012 : Eaves, 2019 : Sepulchre) et les viols (1997 : Meyers, 1995 : McCormick), sur les études portant sur les récits et les mythes entourant les violences sexistes (1997 :Madriz, 2021 :Lochon) et sur leur influence sur le travail des médias et de la justice (2019 : Lieber), ainsi que sur une connaissance empirique du travail de journaliste et de ses contraintes.
En menant plusieurs recherches analytiques réalisées entre 2019 et 2022, décadréE a pu émettre l’hypothèse que les éléments problématiques s’expliquent à la fois à travers des enjeux individuels (la sensibilité des journalistes), structurels (le cadre et la ligne rédactionnelle) et systémiques (les constructions culturelles entourant les violences). L’organisation des rédactions, les contraintes de temps, de ressources, ainsi que l’obligation de format ou d’images influencent en effet le traitement médiatique des violences sexistes. Plus encore, la connaissance des codes spécifiques à l’écriture journalistique permet de mieux appréhender la qualité d’un article et les biais inhérents.
Bibliography
EAVES, “Just Women”, 2012.
GUÉRARD Ghislaine, LAVENDER Anne, « Le féminicide conjugal, un phénomène ignoré. Une analyse de la couverture journalistique de trois quotidiens montréalais », Recherches féministes, vol. 2, n°12, 1999, pp. 159-177.
KELLY Liz, Surviving sexual violence, Minneapolis, University of Minnesota Press, coll. « Feminist Perspectives Series », 1988.
LIEBER Marylène, GRESER Cécile, PEREZ-RODRIGO, « Le traitement pénal des violences sexuelles à Genève, Une étude exploratoire », 2019, IRS Working Paper n°14.
LOCHON Annie, « Trente ans de médiatisation des violences sexistes et sexuelles : L’exemple de deux journaux français », Emulations - Revue de sciences sociales, 2021.
MADRIZ Esther, « Images of criminals and victims: A study on Women’s Fear and Social Control », 1997, Gender and Society, Vol. 11, n°3, pp.342-356.
MADRIZ Esther, « Losing a generation: probing the myths and realities of youth and violence », 1997, Social Justice, Vol. 24, n°4, pp.1-6.
McCORMICK, C. (dir.) 1995 Constructing Danger: The Misrepresentation of Crime in the News. Halifax, Fernwood Publishing.
MEYERS, Marian 1997 News Coverage of Violence Against Women: Engendering Blame. Newbury Park, Sage Publications.
SEPULCHRE Sarah, « La médiatisation paradoxale des violences à l’égard des femmes dans la presse quotidienne belge francophone », French Journal for Media Research, vol. 11, 2019.
2019.
WITGENS Caroline – Exploring #Metoo testimonies as security counterdiscourses. From Twitter to the “traditional” press
This paper contends that the Metoo hashtag and the testimonies that it gathers can be considered as an emerging space for security counter-discourses. Indeed, I argue that this space offers alternative and marginal security narratives in that they differ from the ones that circulate via traditional and mainstream media and emerge from the margins of society. In this paper, these counter-discourses are identified and characterized through the analysis of a selection of tweets. First, I intend to focus on the reasons why these specific discourses can be regarded as security counter-discourses, as well as on their political effects. Then, thanks to a corpus of press articles, I will examine the flow of these tweets to traditional and mainstream media. This approach will highlight, on the one hand, how the identified counter-discourses, beyond the issue of their content, offer a construction of security narratives that is different from the ones that are identified in the traditional and dominant press, while foregrounding, on the second hand, that these counter-discourses undergo alterations in the process.
Les témoignages #Metoo comme contre-discours sécuritaires. De Twitter à la presse « traditionnelle »
Cette communication propose d’envisager le hashtag Metoo et les témoignages qu’il rassemble comme lieu d’émergence de contre-discours sécuritaires, proposant des récits de la sécurité alternatifs et marginaux - alternatifs à ceux qui circulent dans les médias traditionnels et dominants, et marginaux en ce qu’ils émergent des marges de la société. L’analyse d’un corpus de tweets permet de faire apparaître et caractériser ces contre-discours. Il s’agit alors, dans un premier temps, de s’intéresser à ce qui fait de ceux-ci, précisément, des contre-discours sécuritaires, et à leurs effets politiques. Dans un second temps, leur circulation vers la presse traditionnelle et dominante est interrogée à partir d’un corpus issu de la presse écrite. Cette démarche permet de montrer, d’une part, que les contre-discours identifiés, au-delà de la question de leur contenu, proposent une construction du récit sécuritaire différente de celles qui peuvent être identifiées dans les médias traditionnels et dominants, et, d’autre part, que leur circulation vers ces derniers ne va pas sans altérations.
Comments